Une sortie de secours depuis le centre-ville vers l’Etoile, en s’inscrivant dans la tradition de la « promenade » comme aménagement urbain.
Depuis le 152 Canebière, nous allons marcher sur le fond de vallée entre le plateau Saint-Charles et le plateau Saint Michel. Ce fond de vallée c’est la Canebière et le boulevard Longchamp.
On est sur des sols artificiels, l’un date de 2006-2007 là où a été faite le tramway, et un qui date de 1977, l’espace Léon Blum et les allées Gambetta, puisque c’est le toit d’un parking.
De là on passe sur la point des allées, devant le kiosque, micocouliers et platanor et tilleuls. Puis vers le square Stalingrad où il y a la terrasse des Danaïdes. Là aussi les micocouliers ont replacé les platanes malades du chancre doré (fin 70s). Les voitures cantonnées à l’extrémité, le tramway, un grand espace piéton avec des arbres adultes de 50 ans, une fontaine entourée d’un bassin: ici le projet urbain est achevé, c’est la matrice qu’il faudrait répliquer partout.
Cours Joseph Thierry et boulevard Longchamp, qui sont des promenades, mais plus tardives, années 1830, et opérations privées. Sous les écorces des platanes, le tigre du platane. Sur Longchamp, il reste quelque vieux platanes, et de ombreux tilleuls. Des arbres viennent d’être abattus. Au 60, on visite le jardin d’un rez-de-chaussée. On est devant l’âge d’or d’un modèle urbaine: le 3-fenêtres marseillais. Les appartements sont traversants entre un boulevard planté et un jardin privé, avec des arbres des deux côtés. Ceux du rez-de-chaussée ont le jardin et la jouissance de l’ombre, mais ceux des étages profitent aussi des arbres des voisins, comme en témoigne une voisine du troisième étage depuis sa fenêtre.
Le palais Longchamp est situé dans un parc, un des très beaux parcs publics de Marseille. Le monument est à la fois un château d’eau et un monument commémoratif de l’arrivée des eaux à Marseille (Espérandieu 1867). C’est là où l’on quitte le fond de vallée pour monter sur la butte Longchamp. On commence par aller à droite du musée, où se trouve le « petit jardin de la directrice ». Un très vieux magnolia au-dessus du buste d’un des inventeurs de la zoologie marine. C’est notamment lui le premier à avoir fait des comptages de poisson dans la rade de Marseille, qui s’est aperçu de la diminution des quantités de poisson. Dans le jardin abandonné, des couches de déblai sous le sol, un délaissé qui offre un paysage d’arbres sauvages en ville – ailantes, figuiers.
Après l’arc de triomphe de la patrie centrale (une grande cascade en rocaille, reconstitution de géologie pittoresque), on le long des escaliers a pour la première fois une strate arbustive, qui permet la présence d’autres animaux. Tout le monument est une ode à l’économie agricole provençale. Dans l’ordre de la description de 1914 par Gustave Mouriès, on a « des filets dans lesquels des poissons sont pris, des corbeilles qui débordent de fleuves, de feuilles et de fruits, des coquilles marines, des dauphins ». Et dans le groupe central, l’allégorie de la Durance, qui est « portée par un char tiré par 4 taureaux, le gonflement plein de sève de la plastique, tout en elle révèle le germe fécondant le terre nourricière, et à ses côtés on a les allégories du blé et de la vigne ». Ce qui crée un lien symbolique entre Marseille et son terroir, le lieu d’une conciliation entre l’urbain et le rural.
Dans la galerie derrière le corps central, le buste de Montricher et une très belle grotte qui était une promenade, un espace rafraishissant d’avant la climatisation. Nous avions l’eau et l’ombre, avant la climatisation. Sur le plateau Longchamp, la terrasse centrale est le toit du château d’eau avec uniquement de la pelouse, mais sur le côté gauche, petites promenades à l’anglaise dans des massifs, et on grimpe dans l’un des massifs pour voir les souches laissées en place (dans le cadre de la nouvelle stratégie biodiversité de la gestion des parcs et jardins). On y trouve des sentes d’enfants. Un sophora japonica. Pavillon d’arrivée des eaux au fond du jardin, qui est la tête de la dérivation Longchamp, qui alimente le centre-ville depuis 1848, que nous allons remonter durant le reste du parcours. Bien qu’entièrement busée, c’est une trame bleue potentielle, qu ice trouve au sommet de l’éperon rocheux entre la vallée du ruisseau de Plombières et celle du Jarret, qui zigzague de part et d’autre de l’avenue des chutes-Lavie.
On passe un petit pont pour entrer dans le parc zoologique, puis on tourne à droite vers le projet de parking Longchamp (un gros projet de parking de 400 places, enterrée avec un toit végétalisé). Un très grand platane a été coupé il y a 3-4 ans, sous prétexte qu’il était malade, mais les copeaux ont été répandus sur la pelouse, chose interdite. Et aucune trace de maladie sur les morceaux qu’on a pu trouver. Le parc Longchamp, jardin d’enfance de Roncayolo, est une promesse témoin de ville-nature – la ruine-témoin de la promesse tenue de Montricher. Au temps de Napoléon, le terradou c’était des vignes; ce parc témoigne d’un terroir urbain métamorphosé par l’eau.
Depuis notre point de départ, nous enchaînons une série de parcs et de promenades – que nous allons tirer vers le nord jusqu’à Fontobscure.
Etre à l’ombre en ville, au calme. Une belle séquence au 18e et 19e qui ne se prolonge pas au 20e, et c’est dommage car il y a le potentiel.
On quitte le parc zoologique par l’avenue des Chutes-Lavie, en suivant la trace de la dérivation du canal par un terre-plain central en pelouse, le pavillon du partage des eaux, et un siphon de la dérivation qui passe sous la route. On remonte l’avenue avec un premier détour par le boulevard Bossy au bout duquel on trouve un très grande propriété avec un parc de 5000 m2 (1/2 ha). Un deuxième détour à gauche par la cité Méditerranée: entre le premier bâtiment et l’avenue, on a un délaissé en pente forte, sur lequel on trouve des nombreux arbres, arbustes et fleurs.
On continue sur l’avenue, et on trouve au milieu du boulevard Guigou une honteuse allée centrale d’oliviers en pot. On fait un crochet à gauche pour faire le tour du parc Beauvoir, une résidence entourée de talus sur 3 côtés, on apprécie la présence du végétal autour des maisons. Sur les talus, on voit des sentiers très utilisés, et un pommier en fruits. Dans la résidence on a des alignements d’arbre qui semblent plus anciens et semblent avoir été gardés de l’ancien domaine agricole.
Un détour à droite par la traverse Force, on pousse une grande porte en métal, et devant on a une bande de pelouse de 400 m par 6 m, qui passe entre les parcelles privées, habitée par un clochard. C’est l’ancienne emprise du canal basé en dessous, entretenue par des aygadiers, qui sont obligés de débroussailler pour éviter les incendies. Le canal a été à ciel ouvert jusqu’à la fin des années 1980. Ces emprises du canal sont toujours propriété de la ville de Marseille – certains en route, d’autres en pelouse. La plupart sont inaccessibles, c’est la première fois qu’in peut y accéder: on y fait un pique-nique.
On repart vers le nord par l’avenue des Chutes-Lavie, un drôle de petit parc public sur la gauche avant la pont sur l’avenue Fleming. On recroise l’emprise du canal muré jusqu’à l’avenue Parrocel. A droite, l’emprise du canal est appropriée en petit jardin privé. Sur la droite, on a des résidences neuves qui se construisent dans l’ancien parc d’une emprise religieuse.
Première rue à gauche, boulevard Moulin Guieu, on passe entre de vieux bâtiments industriels. Dans les années 1880 se sont construits des groupes de moulins, qui profitaient de la « houille blanche » des eaux du canal. Au fond du boulevard, on aperçoit l’emprise abandonnée du canal, il y a beaucoup d’eau, les arbres poussent si fort qu’ils éventrent les murs. De là on remonte vers la rue André Isaia: les chutes de Monsieur Lavie qui ont donné leur nom au quartier. Au début de la rue, la maison du directeur avec 3 beaux palmiers dans son jardin. En descendant de la rue, des petits arbres et de l’herbe poussent dans les craquelures du bitume, épargné par le brossage mécanique.
Au fond à gauche, on emprunte la traverse Montcault, une des dernières belles traverses agricoles marseillaises, route étroite entre les murs, témoin de l’ancien paysage bastidaire. De là, grâce à une clef qui nous a été prêtée, nous entrons dans la cité-jardin Saint-Just. Du HBM de la fin des années 1920, la cité-jardin paraît être bâtie de petits pavillons individuels qui en fait sont composés de 4 appartements avec jardins privatifs. En haut, c’est le « plateau des Marguerites » (où la plupart des jardins sont comblés par le petit bâti des vérandas), que l’on quitte par des chemins d’écoliers à l’azur des voitures, intégrés par le plan de départ. Au fond de l’avenue des Renoncules, on voit le grand parc mitoyen de la cité-jardin, qui appartient à l’institution religieuse Saint-Jean de Dieu. C’est un parc qui doit faire 5 ha, dans lequel on a même vu des chevaux et des biches.
On quitte la cité par l’avenue des Clématites, qui est sur un talus fortement planté de platanes, et on descend l’avenue Corot en passant sous l’aqueduc. Première à gauche, traverse de la Palud, et on a une entrée dans le parc de Fontobscure. On a ainsi relié le parc Longchamp à celui de Fontobscure en suivant du végétal en ville. Notre promenade souligne ou invente un fil de trame verte urbaine potentielle. Le parc de Fontobscure est un ancien domaine basttidaire acquis par la ville et transformé en parc à la fin des années 1970 (comme Brégante, Billoux, Maison-blanche, Château Saint-Cyr…) selon la politique de la Direction des Parcs et jardins.
Un premier crochet à gauche nous permet de voir un ancien bassin de répartition des eaux du canal, aujourd’hui en ruine. On grimpe sur la colline pour profiter du panorama sur toute la ville jusqu’à la mer et vers les collines de l’Etoile au nord qu’on espère rejoindre en prolongeant la trame verte.
On quitte le parc vers le Nord par l’avenue Prosper-Mérimée en traversant les deux grandes pelouses intensément utilisées par les promeneurs, on fait le tour des anciens bassins, où les arbres sont tellement grands qu’on se promène à l’ombre.
Un projet de coulée verte qui n’a pas été fait, mais qui avait été formulé par Jollivet au début des années 1980: au lieu de buser le dérivation du canal Longchamp, on aurait pu en faire une ligne de parcs.
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« Longchamp-Fontobscure, la trame verte des canopées » par Safi et Nicolas Memain – samedi 6 octobre 2018
Ce récit est tiré de promenades que s’inscrivent dans le programme de 5 ans du projet européen Nature 4 City Life (2017-2022) qui favorise une meilleure intégration de la nature dans le projet urbain dans un contexte de changement climatique.