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1001 NUITS

Une constellation de récits…

À partir du GR2013, comment collecter et partager les contes et légendes qui forment le corps métropolitain, réel et mythique ? Comment donner à la métropole un récit de fondation ?

Dans un territoire profondément marqué par une histoire coloniale rarement évoquée, nous réimportons un ouvrage fondateur de l’orientalisme, traduit et en partie réinventé par l’arabisant Antoine Galland. Mobiliser un patrimoine, c’est toujours un pillage. Lever une carte, c’est conquérir un lieu. Tous les récits de fondation sont violents. Nos Mille et une nuits n’échapperont pas à notre condition : elles l’assument, la racontent, la partagent. Espérons que ce soit un petit mal pour un grand bien, une petite violence qui nous rapproche d’une guérison.

Les Mille et une nuits est un recueil anonyme de contes populaires écrits en langue arabe, d’origine persane et indienne, issus d’un recueil perse, vraisemblablement destiné à l’éducation des gouvernants. Trahi par son épouse, le grand sultan d’Inde et de Perse, jusque-là respecté de tous, décide d’épouser chaque soir une femme qu’il tuera à l’aube. La fille de son grand vizir, Shéhérazade, se sacrifie au sultan dans l’espoir de mettre fin au masssacre qui menace le royaume – et ce en lui racontant des histoires, d’aube en aube.

Ça se passe au crépuscule : le moment où l’on bascule du sol au ciel. Le mouvement de l’imaginaire prend le relais du mouvement de la marche. On entre dans l’inconscient collectif, dans les archétypes. Ce qui s’éteint la nuit, c’est le territoire ; mais le paysage est toujours là. Une fois la nuit arrivée, le territoire devient sauvage, physique, les frontières s’estompent.

La nuit, on lève les yeux, la métropole devient visible, dans des constellations.

Des étoiles incommensurables, séparées par des années-lumières, dessinent des formes. Certaines étoiles brillent plus que d’autres : le complexe de Fos, les croisades… D’autres sont plus petites : la planque de Gaëtan Zampa au Ranquet, le périple quotidien du fils de Buffalo Bill au centre de tri, la saveur de la poutargue sous la langue. On fait des liens entre les choses, et ça dessine des figures. La métropole est un archipel, mais aussi une nébuleuse : elle existe dans l’articulation des échelles. Il y aura des anecdotes et des récits de fondation, des pages d’histoire oubliées et des prophéties, et même une préhistoire du futur. Des récits de différentes échelles, sans hiérarchie.

Ces contes métropolitains pour adultes seront, comme tous les récits de fondation, des récits d’amour et de mort.

L’histoire est créée par ceux qui en ont besoin. Nous en avons besoin – donc nous allons l’écrire ensemble. Nous emmenons pour cela les livres de Giono et de Nostradamus, de McKay et de Strabon, de Maurras et de Pythéas, de Bellaud et de Sembène, de Dell’Umbria et de Michel Chevalier. Nous écoutons Lhasa et Keny Arkana. Nous rouvrons les numéros de la revue Café Verre et les récents Récits d’hospitalité.

Pour raconter les contes et légendes de la métropole marseillaise, il faut aller bien au-delà de l’histoire de France.

Baptiste Lanaspeze

Lire Ventilo HORS-SÉRIE N°1

Lire Ventilo HORS-SÉRIE N°2

Lire Ventilo HORS-SÉRIE N°3

Pléiades : groupe de sept étoiles qui constitue un petit amas très groupé dans la constellation du Taureau et bien visible les nuits d’hiver.

Par glissement, groupe de sept poètes français du 16ème siècle.

Dérivé : une pléiade, une grande quantité.

Les pléiades sont des divagations littéraires à partir d’un lieu. Les illustrations et extraits de textes réunis dans ces livrets ont été rassemblés par l’équipe du Bureau des guides pour chaque rendez-vous des 1001 NUITS. Ils nous parlent de géographie, de géologie, d’hydrographie, d’histoire, de biologie, de politique, de choses savantes mais également de littérature, de témoignages et de poésie, d’ici et d’ailleurs, d’évènements passés ou à venir.

Ils permettent de raconter le lieu où nous nous sommes réunis chaque soir pour regarder ensemble le soleil se coucher. Ils sont destinés à être lus face au couchant par les marcheurs présents lors de ces soirées.

C’est une entreprise sans fin que d’assembler ces textes, c’est également un exercice passionnant que de les rechercher et une joie de les découvrir et de les poser côte à côte. Ces recueils ont été notre manière de retranscrire nos découvertes et nos intuitions. Un chemin pour imaginer avec les artistes invités autant de soirées dans tous ces endroits insolites où nous vous avons convié.

Avec ces mille et une histoires c’est autant une constellation qu’un portrait qui se dessine.

L’équipe du Bureau des guides du GR2013

19 pléiades ont été réalisées et distribuées au public lors des rendez-vous durant ces six mois.

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Chroniques de sentier

Une chronique au sein du média Marsactu qui met en lumière un aspect du territoire de la métropole.

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Les récits de Foresta

Prendre le temps d’observer collectivement Foresta…

Il était une fois au nord de Marseille un site exceptionnel, une colline argileuse au dessus de la mer. Longtemps, on y a cultivé la vigne et prélevé la matière première pour des ateliers de poterie. Au XIXe siècle, la colline a renoncé peu à peu à ses activités agricoles et artisanales pour alimenter les tuileries du bassin de Séon et accueillir des quartiers industrieux et populaires.

Le château du Marquis de Foresta surplombait la colline jusqu’à ce que les batteries allemandes du Frioul le bombardent en 1944. L’exploitation de la carrière avait alors cessé et la pinède bastidaire où les familles du quartier venaient pique-niquer le dimanche est devenu un terrain d’aventures entre les ruines.

Quelques décennies plus tard, le projet de centre commercial Grand Littoral redessine les pentes et le paysage. L’espace en contrebas devient “la coulée verte”, identifiée dans les plans d’urbanisme comme grand site à vocation sportive ou de loisirs. Mais le temps semble se suspendre pour ces terrains qui, en dépit de ces intentions, sont depuis des années à la limite de l’abandon.

Par de multiples marches d’exploration, nous prenons le temps de collectivement observer Foresta.

Au travers ses sols, ses arbres, ses paysages, ce site a beaucoup à nous apprendre sur la biodiversité en ville mais aussi sur l’histoire industrielle et sociale de Marseille.  En collectant et racontant ses multiples histoires nous espérons contribuer à prendre soin de ces lieux et à les vivre en commun.


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Métropole Commune – récits

Mettre en forme ce que pourrait être un « projet métropolitain »…

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Les promenades sonores

Des promenades sonores autour du GR2013

Des artistes, des documentaristes et des habitants ont composé ces parcours sonores pour vous faire partager à leur façon, entre exploration d’endroits méconnus et regard décalé du connu, le territoire de Marseille Provence.

Les Promenades sonores se téléchargent librement sur ce site puis s’écoutent in situ, dans un paysage et dans une situation choisie. Ces balades proposent un voyage sonore lié à la marche, à l’arpentage qui permet de ralentir, de changer d’échelle, de se glisser dans les interstices de la ville, dans ses usages, d’observer les traces.

Elles voisinent avec le GR2013, avec qui elles partagent parfois le tracé, mais surtout le dessin ou l’imaginaire d’une métropole invisible : celle des lisières et des usages, entre ville et nature, industries et agriculture, autoroutes et chemins buissonniers.
On y entend ainsi des sons naturels, des voix d’habitants, des personnages de fictions, autant de récits qui documentent, musicalisent ou poétisent la découverte à pied du territoire.

Les Promenades sonores sont nées d’une réflexion de la radio culturelle marseillaise Radio Grenouille à l’annonce du titre de Capitale européenne de la culture attribué à la ville en 2013 :

– Que signifie « valoriser le territoire » ?

– De quels territoires parle t-on dans une capitale européenne de la culturelle?

– A qui s’adresse l’offre culturelle de la future capitale ?

– Comment rendre visible les invisibilités de la ville sans pour autant les faire disparaître par le simple fait de leur révélation ?

– Comment valoriser le rapport et la connaissance des habitants de leur territoire, les impliquer dans de la fabrication de récit collectif à partir des récits singuliers ?

– Comment s’adresser à beaucoup de gens tout en restant dans un art de la discrétion ?

– Comment raconter, quels récits proposer à celui qui vient d’ici, à celui qui vient de loin?

– Qu’est-ce qu’être touriste, pouvons-nous être touriste de notre propre territoire ?

De ces questionnements, est venue l’envie de développer un travail autour de l’écriture de « Promenades sonores » (Soundwalks), susceptibles de proposer une forme pertinente pour inviter un public -de l’habitant au visiteur – à pratiquer de manière à la fois sensible et documentée le territoire local.

Auteurs : Radio Grenouille-Euphonia, Julie de Muer et plus de 30 auteurs (artistes et habitants).

ON CULTIVAIT LES ÉTOILES

Christophe ModicaSainte-MartheMarseille 13014 

L’EFFACEMENT

Xavier Thomas

La Cabucelle

Marseille 13015

LA CROISIÈRE DES SPECTRES

Jean-Pierre Ostende

Pharo, Marseille 13007

WALK MY MEMORIES

Lionel Kasparian et Elodie Presles

Saint-Barnabé, Marseille 13012

PLAN B

Compagnie Amanda Pola

Cité Radieuse, Marseille 13008

MANGER OU ÊTRE MANGÉ

Emmanuelle Bentz et Julien Hô Kim

Châteauneuf-les-Martigues

HIATUS

Par Ce Passage Infranchi

Port-de-Bouc

FICTION CORPORELLE MARSEILLE : SE SENTIR AUX DIMENSIONS DE L’AGGLOMÉRATION

Boris Nordmann

LE SOUFFLEUR

Christophe Perruchi

La Plaine, Marseille 13006

L’OM ET LE BON DIEU

Mehdi Ahoudig (ARTE Radio)

Saint-Julien, Marseille 13012

JOUR OUVRABLE

Ici-Même [Tous Travaux d’Art]

Belsunce, Marseille 13001

EN MARCHE

Julie De Muer

TER_RAZZE !

Natacha Muslera

Noailles, Marseille 13001

L’INSOLITE HISTOIRE DE ZOHRA BENCITRI

André Lévèque

Salon-de-Provence

LES GENS DE LA GARE

Christophe Modica

Cabriès

GRAND PAYSAGE

Agence Touriste (Thierry Lafollie – Mathias Poisson – Virginie Thomas)

LE CAMPEO

Julie De Muer

Martigues

QUARTIERS EST, ENTRE HUVEAUNE ET COLLINES

Rives et Cultures et Nelly Flecher

Vallée de l’Huveaune, Marseille 13011

L’ENTREVUE

Xavier Thomas

Istres

LES FEUX DE SAINT-ANTOINE

Julie De Muer

Saint-Antoine, Marseille 13015

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L’Eygoutier

Le canal de la Rode, été 2018

En même temps qu’il détourne le Las, Vauban en fait de même avec l’Eygoutier qui formait une sorte de petit delta marécageux au niveau de l’actuel Port Marchand et envoyait ses sédiments dans la petite rade. On l’appelle aussi “rivière des amoureux” ce qui serait en fait une déformation de “rivière des muriers”.

L’Eygoutier fut donc dirigé vers l’autre côté de la pointe de la Tour Royale, côté grande rade, d’abord par un chenal au parcours alambiqué qui correspond à l’actuel boulevard Cunéo, puis via un tunnel rectiligne qui passe sous la butte du Mourillon jusqu’à l’une des digues des plages artificielles, entre l’anse de la Source et l’anse Mistral. Rien n’y signale le débouché de ce petit fleuve côtier, qui ne pourrait pas rejoindre la mer plus discrètement.

Ce que beaucoup appellent le canal de la Rode, cette grande tranchée de béton le long de laquelle on trouve des terrains de tennis et de grands immeubles de bureau et d’appartement, est donc un fleuve.

C’est la peur des inondation, et la volonté d’apporter une réponse pragmatique qui ont construit ce paysage, qui n’est pas sans rappeler la Los Angeles River et la fameuse course poursuite à moto de Terminator 2. Le cours d’eau n’était perçu qu’en tant que nuisance ou danger potentiel, une chose à évacuer le plus vite possible.

Actuellement on assiste à un basculement, un glissement, dans tous les domaines qui relèvent de l’aménagement du territoire. On cherche de plus en plus à “faire avec” les éléments naturels, et notamment les cours d’eau, et plutôt que d’accélérer l’écoulement de l’eau pour vite s’en débarrasser, on va de plus en plus chercher à le ralentir, à absorber sa force, notamment avec des berges douces et des ripisylves. On dit en effet qu’un fleuve a la force qu’on lui oppose. C’est donc toute une génération d’ouvrages comme celui-ci, datant pour la plupart du Xxème siècle, qui ont vocation à évoluer vers d’autres formes, des formes qui vont mettre en scène la possibilité d’un dialogue avec le vivant, avec les éléments, avec la Terre, et qui ne seront plus seulement la démonstration d’une volonté de domestication généralisée du monde.

Si les prévisions d’augmentation de la température moyenne annuelle se confirment pour 2100 (+2 à +7°C à Toulon selon le GREC) c’est bientôt nous, humains, qui allons supplier ce type de petits cours d’eau de bien vouloir nous apporter de la fraicheur et de l’ombre par les arbres qu’ils irriguent en chemin.

Entre deux Provences

Si le Las prend source au sud du vaste plateau karstique du Siou Blanc et descend vers la mer dans une vallée encaissée aux allures de petite montagne, l’Eygoutier, lui, prend source dans un ancien marais aujourd’hui en grande partie couvert de remblais : l’Estagnol. Le long de l’Eygoutier, on rencontre du schiste, du grès et peu de calcaire.

Remonter ces deux petits fleuves rend bien compte de la charnière à laquelle se trouve la métropole Toulonnaise, entre Provence Cristalline et Provence Calcaire. Et cette distinction géologique se lit partout, dans les vieux murs de la métropole : ponts, maisons, églises, restanques, limites de propriétés, dalages… On a parfois des murs qui mélangent le calcaire et le grès voire le schiste. Toulon est plutôt calcaire, Hyères plutôt schisteuse, le Pradet ou la Crau sont en grande partie de grès mais d’un coin à l’autre, toutes se mélange même si la pierre la plus utilisée au XXeme siècle restera le béton armé.

L’autre tunnel

Au niveau de la porte des Oliviers, ce grand rond-point en forme d’os à moelle qui est aussi l’entrée est du tunnel de Toulon, l’Eygoutier, se couvre pour passer sous l’autoroute, dans le noir, et la longer par en dessous, sur un kilomètre, vers l’est. Des adolescents s’y donnent rendez-vous, s’y font peur et y prennent aussi le frais dans l’obscurité.

Certains remontent le fleuve jusqu’au bout et rejoignent la piste cyclable, celle qui a été aménagée sur l’ancien chemin de fer. Ce train suivait plus ou moins la côte jusqu’à Saint-Tropez en longeant sur les premiers kilomètres le petit fleuve de l’Eygoutier.

Le nouveau déversoir du Pont de la Clue (Le fleuve arrive depuis la droite. Sous le pont en haut à gauche de la photo l’Eygoutier part vers Toulon. En bas, le déversoir vers le tunnel d’évacuation), printemps 2019

Renaissance

Aujourd’hui nous sommes notamment accompagnés de Rudy Nicolau, Directeur du Syndicat de Gestion de l’Eygoutier, et Guirec Quefelou, chef du service Gestion des Milieux Aquatiques et des Zones Humides à la Métropole Toulon Provence Méditerranée.

Ils nous expliquent comment l’Eygoutier était jusqu’à récemment généralement moribond, sauf en période de pluie. Le fond de l’eau était souvent boueux, l’eau quasi stagnante. Cela était dû à un ouvrage, plus en amont, au pont de la Clue, un ouvrage qui dans son ancienne configuration, envoyait l’essentiel de l’Eygoutier directement vers la mer via un tunnel d’évacuation (le tunnel de la Clue). En effet, ce n’était que le trop plein, lors des épisodes de forte pluie, qui partait vers le lit du fleuve, direction Toulon.

Depuis 1984, un batardeau automatique était censé envoyer un débit minimum vers le fleuve mais le système était défaillant et ce n’est que depuis le début de cette année 2019, après des mois de travaux, que l’ouvrage fonctionne enfin comme prévu et que le fleuve a retrouvé un débit minimum. Et ça se voit. L’eau est claire, on voit des poissons, notamment les fameux barbeau méridionaux mais aussi des anguilles. Les sédiments sont à nouveau roulés lentement vers l’aval. Le lit de sable et de gravier s’est éclairci.

L’Eygoutier canalisé au plan de la Garde, printemps 2019

Renaturation

En amont du pont de la Clue, l’Eygoutier traverse le Plan de la Garde, ce vaste espace plan avec ses cultures maraîchères, centres équestres, pâturages et serres horticoles. C’est là que le Département travaille depuis 20 à l’ouverture d’un parc nature de 130 hectares, avec jardins familiaux, plans d’eau, observatoires ornithologiques, et une maison de la nature, encore en construction pour le moment.

Il y a des siècles, ce grand marais a été fortement remanié, travaillé, jusqu’à obtenir des terres cultivables parcourues de canaux, un peu comme la plaine du Comtat Venaissin avec les fameuses sorgues. L’Eygoutier dans cette histoire, a été transformé en un grand fossé rectiligne, jusqu’à ce que les aménageurs du parc nature ne décident sa “reméandration” artificielle. On lui a dessiné un parcours en zig zag, pour allonger son cours, l’étirer, tout en le dotant de berges adoucies avec ripisylves. Ce n’est pas vraiment un retour à la situation préalable puisqu’on a pas recréé le marais d’antan, mais une opération humaine visant à atteindre un état écologique et paysager jugé “bon” par le développement plus ou moins spontané d’espèces vivantes (poissons, batraciens, insectes, oiseaux, végétaux). C’est ce qu’on appelle la “renaturation”, un concept ici poussé assez loin puisqu’on a par exemple scalpé la couche supérieure du sol contenant les graines et les bulbes, remodelé le terrain, creusé des bassins et dépollué ce qui devait l’être avant d’épandre à nouveau cette couche de sol sur toute une partie du parc, ce qui a donné plutôt de très bons résultat (explosion de fleurs au printemps 2018 et chaque année depuis).

Le concept n’est pas neuf. Rappelons par exemple que le mont Faron était devenu totalement chauve jusqu’à ce qu’on ne le reboise pendant la seconde partie du XIXeme siècle, en semant des graines de pins dans de grands trous creusés dans la pierre à la pioche. On cherchait ainsi à limiter l’érosion du Faron qui aurait pu contribuer à ensabler la rade (toujours cette même crainte). La renaturation du plan de la Garde, elle, a plutôt une vocation paysagère et pédagogique.

L’ancien marais de l’Estagnol, été 2019

Trouver la source

Plus en amont encore, l’Eygoutier reprend son profil de canal rectiligne, il devient de plus en plus difficile à suivre et on le perd parfois. Il va repasser sous l’autoroute, longer la Zone d’Activité de Gavary où se côtoient notamment un parc d’attraction pour enfants, un important ferrailleur et l’une des églises des frères de Plymouth. Puis c’est enfin l’Estagnol, ce marais, qu’on pourrait décrire comme un col. Un col excessivement plat, entre le bassin versant de l’Eygoutier à l’ouest et celui du Roubaud à l’est. L’Estagnol était donc ce marais, cette éponge qui donnait naissance à deux petits fleuves côtiers symétriques.

Traversé par la voie de chemin de fer de Hyères, bordé au nord par l’autoroute A570 et le canal Jean Natte (XVeme siècle), c’est un espace qu’on a toujours cherché à combler, à assécher, à remblayer. Une partie importante du site sert de dépôt de produit de chantiers (sables, graviers), on y a installé une déchetterie puis plus récemment des terrains de sport. On a même pensé un moment y construire un grand centre logistique Carrefour avec embranchement ferré, avant de renoncer.

Lorsque l’on se promène à pied sur le terrain à l’est du fossé stagnant de l’Eygoutier, on reconnaît différents matériaux dans ce sol aride : restes de potelets en béton, gravier, parpaings, pierres de parement, sable, plâtre. Des projets de renaturation sont également à l’étude, comme au plan de la Garde, mais dans un version sans doute moins accessible au public. Des questions se posent : faut-il remettre le site dans son état initial avant les remblais si tant est que cela soit possible? Que faire avec les espèces protégées qui ont fini par pousser sur les remblais?

Au sud de l’Estagnol, sur le flanc nord de la colline du Paradis, à l’arrière des lotissements du quartier de la Moutonne, on découvre entre les hautes herbes, dans un creux, sous les chênes verts, un petit filet d’eau qui s’écoule d’un tuyau dans un ouvrage modeste en béton formant un petit nymphée. C’est cette petite source, qui tourne le dos à la mer, que l’on considère donc comme l’origine de l’Eygoutier.

La source de l’Eygoutier à la Moutonne, été 2019

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Conversation marchée #2

Portrait de Patrick Bayle
Portrait de Patrick Bayle

Le vent s’est levé ce matin sur Foresta et Patrick Bayle est notre invité. Naturaliste de formation, il a participé à la rédaction de fiches d’observation pour l’Atlas des oiseaux à Marseille, a travaillé au Musée d’Histoire Naturelle de Marseille et à la ville où il est aujourd’hui en charge de la biodiversité. Il nous prévient, pour l’observation des oiseaux le vent, l’horaire tardif, il est 9 h 30, et le groupe ne sont pas des conditions favorables. Mieux vaut se déplacer au petit matin ou au coucher du soleil, en solitaire ou en petit nombre. Nous partons donc simplement en quêtes des écosystèmes qui pourraient abriter des oiseaux et des traces qui nous indiquerait leurs présences.   Le Grèbe castagneux, la façade maritime et le bassin de rétentionComme les autres oiseaux migrateurs, le Grèbe castagneux aborde Marseille par la façade maritime. Après une traversée transméditerranéenne, il arrive sur les côtes épuisé et découvre à Foresta une halte rare, avec des habitats, de la nourriture et peu de prédateurs (moins que dans les iles.) Foresta est structuré autour de deux bassins de rétention d’eau. Malgré leur caractère artificiel ces bassins, dont la qualité première est de ne pas avoir été bétonné, ont évolué en roselière. Ce sont des zones humides, assez uniques à Marseille, qui attirent des espèces aquatiques pour s’y reproduire ou pour une halte migratoire. En 2014, Le Grèbe a été aperçu en période de reproduction dans ces bassins.

  Ces bassins sont gérés comme des ouvrages techniques, aujourd’hui nous constatons que le bassin est vidangé, sans doute par souci de maintenance, par méconnaissance de sa valeur écologique et paysagère ou pour lutter contre le moustique tigre. Mais maintenu en eau et géré comme un écosystème vivants le bassin n’offrirait pas d’habitat propice au Moustique tigre, qui préfère largement les coupelles d’eau stagnante oubliées au fond du jardin… Une meilleure gestion offrirait aux oiseaux un point d’eau douce et un refuge rare sur les côtes littorales. Il nous semble donc important d’élargir la conversation, et pourquoi pas d’aller à la rencontre des gestionnaires ?   Le Geai, le Pigeon, la Grive et la barre rocheuseJuste sous la petite barre rocheuse en dessous du lycée professionnel de la Viste, quelques chênes pubescents forment une chênaie, relique de l’ancien domaine de Foresta. 

La forêt de chênes pubescents

Ces arbres hébergent le Geai des chênes, un beau corbeau bleu qui se régale de glands qu’il amasse, cache et oubli, jardinant ainsi les forets de demain. En chemin, nous trouvons également des os de pigeons parfaitement nettoyés, Patrick Bayle nomme et situe chacun d’entre eux : un bassin, des os de pattes, d’aile, un os d’épaule et un autre situé au niveau du sternum, qui n’existe que chez les oiseaux.

Les os du pigeon près de la barre rocheuse

En grimpant un peu dans la forêt, dans la barre rocheuse, se cache une grotte, à l’intérieur, plusieurs variétés de coquilles d’escargot brisées indiquent l’emplacement d’une forge. La forge est utilisée par des oiseaux comme la grive musicienne, entendue ce matin, ils coincent les coquilles entre deux cailloux pour les maintenir et les briser à coup de bec. C’est donc un peu l’atelier de cuisine de la grive…  

Le Serin et le PinDans les milieux ouverts qui composent une grande partie de Foresta, il y a beaucoup de pins isolés. Depuis celui-ci, le chant puissant et virtuose du Serin cini se fait entendre. Le serin chante son territoire, et le marque. Aux mâles, il signifie ainsi sa présence : ne viens pas, je suis chez moi… Aux femelles il signifie tout autant sa présence avec une nuance : rejoins-moi, je suis chez moi…

Un milieu ouvert avec des arbres isolés

Le Goéland et la villeAu début du XXe siècle, un naturaliste britannique s’extasiait au cours d’une « expédition » sur les iles marseillaises de la centaine de couples de goélands qui y nichait. Aujourd’hui, c’est des milliers de couples de Goéland leucophée qui résident à Marseille. Surnommés éboueurs, ils sont des indicateurs de nos modes de vie si producteurs de déchets. Comme quoi la nature bouge, les milieux évoluent, d’autant plus quand ils sont fortement anthropisés, les espèces ne sont pas figées dans leur devenir. Ce qui est abondant peu devenir rare et vice-versa. 

La forêt d’arbustes

Les arbustes et la FauvetteAu début du Vallon nous conduisant vers le Parc Brégante, on retrouve la colline non remblayée et ses sources. La densité d’arbustes très importante offre des caches et des habitats propices à toutes une série d’oiseaux merle, rossignol, mésange… Nous entendons le cri d’alarme de la fauvette mélanocéphale, la seule des cinq fauvettes méditerranéennes à vivre en milieu urbain.Écoutons là, car jamais nous ne la verrons. Elle fait partie de ces oiseaux avec lesquels nous vivons, que nous entendons, mais qui jamais ne se montrent à nos yeux.  A Foresta déjà 76 espèces oiseaux ont été observées.    

Une façade maritime hospitalière

Pour aller plus loin ou transmettre vos observations Atlas des oiseaux nicheurs de Marseille, coordonné par Eric Barthelemy, Delachaux et Niestlé 2015https://www.faune-paca.org/Dessins : Stéphane Brisset (SAFI)Photos : Robert Duband (un habitant participant)

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NATURE 4 CITY LIFE – Les récits

Récits d’exploration des relations ville / nature

dans les métropoles d’Aix-Marseille Provence et de Toulon Provence Méditerranée

 

 

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