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À l’agachon des points de vue

Le 10 août 2016, un incendie a embrasé la partie Est du plateau de l’Arbois, sur les commune de Vitrolles, Rognac et des Pennes-Mirabeau.

  Le 10 août 2016, un incendie a embrasé la partie Est du plateau de l’Arbois, sur les commune de Vitrolles, Rognac et des Pennes-Mirabeau. 27 km2 ont brûlé, soit un dixième environ des 250 km2 du vaste plateau. Emporté par le mistral, un immense nuage orange a recouvert Marseille plusieurs heures. Le grand Arbois, le cœur sauvage de la métropole, d’ordinaire si discret, a déposé ses cendres jusque dans nos habitations. Plusieurs jours après, l’odeur âcre du bois brûlé imprègne toujours les entrées d’immeubles. La partie dont il est question dans cette chronique a été épargnée.

Depuis le nouveau parking du parc départemental, on s’élève vers l’ouest au-dessus du hameau de la Tour d’Arbois par un chemin pierreux. Après avoir dépassé la ligne TGV par un pont, et le canal de Marseille ici en tunnel sous la colline, le chemin rejoint la ligne à haute tension. À mi-pente, en un lieu exposé au vent, au-dessus d’un vallon étroit, tout à coup les replis du plateau se mettent en équilibre. On s’arrête. On se retourne. Il y a une série de paysages qu’on aurait pu dépasser sans les voir.

Sous le pylône, les crocus sont en fleurs.

Le premier paysage qui se déroule, c’est le petit vallon en dessous de nous. De haut en bas, le champ étroit et zigzagant d’une « mange » aménagée par les chasseurs pour nourrir le gibier fait une rivière de verdure trouée d’arbres, qui devient ensuite un vallon plus sauvage, et se heurte au canal de Marseille dans ce qui semble être une espèce de barrage-remblais. Ce vallon fut autrefois un bassin de décantation des eaux limoneuses de la Durance.

Plus loin, au-delà du canal et de la ligne TGV, ce paysage intermédiaire s’ouvre et s’élargit vers Aix. Dans le prolongement du chemin d’où nous venons, filent les pylônes à haute tension vers les derniers immeubles de la Duranne, la ville nouvelle d’Aix et, tout au fond dans l’axe, la cheminée de l’usine thermique de Gardanne, qui alimente en électricité une bonne part de la Provence. De part et d’autre de la grande ligne électrique Avignon-Nice (la principale ligne de Provence, avec 400 000 volts) deux tableaux se dessinent : à gauche, le pays d’Aix, d’Eguilles à Aix-en-Provence, culmine avec la masse ici triangulaire de la Sainte-Victoire ; et à droite, Gardanne et se terrils s’accrochent au massif de l’Etoile et son Pilon du Roi.

Entre deux fourrés de chênes kermès, on aperçoit le bâtiment de la gare Aix-TGV. Derrière le canal, tous les quarts d’heure environ, nos discussions sont couvertes par le bruit d’un long train bleu qui vient fendre l’espace.

Les artistes du GR2013 ont choisi ce site pour y installer une sorte de cabane, un igloo de tasseaux, une maquette à l’échelle 1 d’un observatoire du paysage. Cet affût métropolitain, cet agachon sauvage équipé de cadres et de longues vues pointe çà et là de nouveaux détails, des micro-paysages : un fourré de romarins et de chênes kermès, une grotte dans la falaise, le terril de Biver entre les barres de métal du pylône électrique, la ligne de l’oppidum d’Entremont, le château d’eau de l’ancien sanatorium, devenu “Europole”, la ligne de pins japonisants découpant le massifde l’Etoile, l’écoulement de l’eau bleue de Durance sortant du tunnel et filant silencieusement dans le canal pour étancher nos soifs métropolitaines.

Photo Geoffroy Mathieu
© Geoffroy Mathieu

Tous ces points de vue font le plateau.

Tout le monde y passe, mais peu de gens regardent vraiment l’Arbois.

Surplombant la métropole à une altitude moyenne de 200 mètres, le plateau est surtout peuplé d’une faune métropolitaine de sangliers et de lapins scrupuleusement comptés et entretenus (par les chasseurs), d’oiseaux protégés dont les aigles de Bonelli (par les écologues), et l’habituelle foule animale anonyme dont tout le monde vit mais dont personne ne parle.

Entre l’aéroport de Marignane et celui des Milles, le plateau de l’Arbois est traversé par la récente LGV et par la vieille route D9 encombrée de ses 40 000 véhicules par jour. Le passage de la D9 en tranchée sous la gare TGV a nécessité de creuser le plateau sur toute la profondeur de sa couche superficielle, révélant ainsi les strates, régulièrement empilées, d’un calcaire orange, rose, friable. Bien plus récent que le calcaire homogène et blanc de la Sainte-Victoire ou des Calanques, le socle géologique de l’Arbois résulte de la sédimentation d’une mer tropicale il y a 30à 40 millions d’années.

Dans les plaines alentour, une série d’équipements, de villes et de villages dansent en ronde autour du plateau : Ventabren, autoroute A8, aérodrome des Milles, Europole de l’Arbois, ville nouvelle de La Duranne, prison de Luynes, Bouc Bel-Air, Cabriès, centre commercial de Plan-de-Campagne, les Pennes-Mirabeau, Vitrolles, aéroport de Marignane, Rognac et Velaux. Le plateau est creusé de profonds vallons qui le découpent en plusieurs sous-plateaux distincts disposés comme autant de planètes autour du “plateau du Grand Arbois” central : la plaine du Cimetière, la plaine du Ban, le Petit Arbois, le bois de Boulard, la plaine des Tisserands, les plaines d’Arbois…

Ce cœur métropolitain est gorgé de secrets – dont l’immense ville oubliée des GIs américains, ses dalles de béton, ses barbecues, ses théâtres de verdure (cf. article C. Vaysse), mais aussi, plus près de nous, ses chasses gardées, ses parties fines, ses légendes, ses aventures sexuelles libres et tarifées, straight ou gay, locales ou régionales.

La moitié nord du plateau, assez sauvage, est entièrement classée, au titre des oiseaux protégés qui y nichent, dont l’aigle de Bonnelli ; et la moitié sud du plateau accueille quant à elle plusieurs grands équipements, dont la gare TGV, un hippodrome, le bassin de décantation du Réaltor et les zones résidentielles de Calas et du Lac Bleu. À peu près au centre du plateau, à proximité de la gare, trône l’immense déchèterie qu’Aix-en-Provence a installée à la limite occidentale de son vaste territoire communal, de sorte que, la pente aidant, les écoulements se déversent sur le territoire de Vitrolles.

Mais au nord comme au sud, les principaux usagers du plateau de l’Arbois sont les chasseurs – au nord, sur des terrains publics gérés par l’association de chasse d’Aix-Les Milles, et au sud sur des chasses privées. Les habitants des villes alentour y pratiquent d’autres loisirs de plein air, comme la randonnée, le footing et le VTT. Chasseurs et randonneurs évitent en général les conflits d’usage par leur intelligence du territoire et par leur détestation commune des motocross, qui tracent à flan de coteaux des drailles ravinantes ajoutant leurs égratignures à cet espace partout griffé de la présence urbaine.

Comme le jardin impérial à Tokyo, le sanctuaire de l’Arbois est le vide central de la métropole.

Texte Baptiste Lanaspeze pour le Bureau des Guides

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Un parc en chemin

Pour ce second épisode, balade autour des lettres géantes sous Grand Littoral.

On est fin juillet, il n’est que 9 h mais on frôle déjà les 30°C. Pas idéal pour aller se balader… Mais le groupe de marcheurs qui finit tranquillement son café au bar du Pont de Saint-Antoine semble prêt à affronter la chaleur pour l’exploration d’un fragment des quartiers nord, quelque part du côté de Grand Littoral. Habitants, musiciens, constructeurs, performeurs, tous ne se connaissent pas encore.

L’expédition va marcher dans les pas de Lucien Vassal. Né dans le quartier voisin de Saint-Louis et toujours habitant de Saint-Antoine, il est tout à la fois cueilleur de plantes sauvages, ancien professeur des collèges, érudit et écrivain des savoirs locaux, ex-maire du 15/16… et donc grand arpenteur.

C’est avec ses récits que nous rejoindrons la « Coulée verte », appellation lisse pour un terrain accidenté. Largement artificialisé au cours de la construction de Grand Littoral au début des années 90, il est peu à peu revenu à une forme « sauvage » au fil des déboires techniques et institutionnels qui ont accompagné la naissance de ce centre commercial aux pieds d’argile.

Quand Lucien était minot, on n’appelait pas ça la coulée verte mais le Marquisat. Ce grand domaine du marquis de Foresta était son terrain de jeux et d’aventures, son lieu de tous les possibles. La famille Foresta était l’une de ces grandes familles bourgeoises que l’on trouve installées au 18e et 19e siècle dans le terroir marseillais. Entre Saint-Antoine et la Viste, elle avait racheté le château des Tours et sa belle pinède, mais aussi les nombreuses terres argileuses formant cette colline suspendue sur la mer.

Nous longeons l’avenue de Saint-Antoine, marche d’approche nécessaire pour entrer dans les plis de ces quartiers à la fois ruraux et industrieux qui entouraient et composaient le bassin de Séon.

Sur l’avenue de Saint Antoine, route royale « qui trace droit » conçue par l’ingénieur Nougaret peu avant la Révolution française pour connecter Marseille au reste du royaume, surgissent des anciens cinémas reconvertis en supérette ou en temple évangéliste, un poteau Eiffel, un ancien relais de poste, un tout nouveau parking pour la halte SNCF pas encore multimodale, des résidences fermées à l’affût de la vue sur mer. Les souvenirs de Lucien révèlent à la fois ces traces fragiles et leur donnent corps, historicité, sens.

Alors qu’on se rapproche de la Viste en longeant de loin le massif de l’Étoile, la bascule s’opère et le regard rencontre soudain l’horizon portuaire. Nous sommes à la lisière de l’ancien domaine, en surplomb de Grand Littoral. Le panorama est saisissant, balayant de la Côte bleue aux îles du Frioul. Mais c’est surtout dans les strates et les éléments combinés qui nous séparent de la Méditerranée que les images stimulent. En arrière-plan, le grand port maritime s’étale. Ses grues bleutées pourraient ressembler à de grands insectes à longues pattes ou à des créatures d’heroic fantasy. À leurs pieds, le jeu de lego des conteneurs en transit, les alignements de cuves rondes stockées pour un voyage immobile et de vastes étendues incertaines. Côté colline, ce sont les récentes grandes lettres « Marseille » qui raflent la mise. Au loin l’un des bateaux de croisières Costa reprend sa route.

Loïc Magnant

D’ici, l’ancienne ligne de côte qui longeait par le chemin du Littoral Saint-André puis Mourepiane jusqu’à l’Estaque apparaît avec évidence. Coincé aujourd’hui entre l’extension du port et l’autoroute A55, Saint-André semble niché entre ses anciens fronts de mer et d’usines.

La nappe urbaine qui entoure le village a mangé les cheminées des tuileries mais la dernière d’entre elles, Monnier, s’active discrètement au pied de la colline remblayée. Car sous nos pieds, il n’y a plus grand chose de la terre d’argile façonnée par les pioches des ouvriers des tuileries et par les jeux d’enfants de Lucien. La légende dit que le volume de béton injecté dans la colline remodelée serait l’équivalent des remblais dégagés par le percement du tunnel sous la Manche.

Quand on pénètre dans la coulée verte aujourd’hui, on est saisi par l’immensité de cette zone de nature indécise. Dans le projet initial de ZAC (zone d’aménagement concerté), le centre commercial était accompagné de programmes de logements, de services et de vastes espaces verts aménagés. On a longtemps vu sur les plans et les maquettes figurer un parc animalier, générant avec le temps une sorte de fantasme collectif autour des animaux qui pourraient enfin s’installer dans cette terre promise.

En marchant avec Lucien c’est plutôt les oiseaux qui nous apparaissent. Encore aujourd’hui on peut y croiser l’aigle de Bonelli, et beaucoup de souvenirs de chasse, où la perdrix et la grive participent à améliorer l’alimentation de la famille ouvrière.

Au fil de la balade, dans cette étrangeté des lieux renforcée par l’abandon progressif du site pourtant revégétalisé et partiellement aménagé, il nous apparaît comme des mirages. Les bassins d’orage se confondent avec les étangs industriels d’antan, le château des Tours flotte dans les airs au-dessus de Leroy Merlin, une cascade de tuiles jaillit sur la pente, des jardins potagers surgissent au détour de la colline aride, le voisin qui fait ses pompes sur le chemin défoncé fait émerger le geste quotidien d’un soldat en attente d’action à la veille de la libération.

Julie de Muer

Dans les usages d’une colline urbaine, transformée par l’industrie, bombardée par la guerre, remodelée de haut en bas, lacérée par les motos et les canettes, se dégagent à la fois un désastre et la possibilité d’un imaginaire. Il relie une multitude de presque-riens qui organiseraient, comme le proposait l’artiste Robert Smithson à propos de la notion de parc, « un processus continu de rapports et d’échanges existant dans un domaine physique : le parc devient une chose-pour-nous ». Le GR 2013 s’est envisagé comme la possibilité de l’invention d’un parc, non pas un enclos qui ferme mais un processus infini (le 8) qui donnerait sens et poésie à la centralité métropolitaine.

En explorant la coulée verte, nous nous invitons à voir les choses dans la multiplicité de leurs relations et non comme des objets isolés.

De cet imaginaire nous espérons pouvoir produire des nouvelles formes d’hospitalité, de circulations, d’échanges qui feraient de ce parc « une chose-pour-nous ».

Photo Dominique Poulain

Lucien nous appelle au loin. Il nous invite à écouter la source. Celle où il allait chercher l’eau petit mais celle aussi qui permet aujourd’hui encore aux jardins potagers voisins de prolonger l’utopie d’une terre nourricière.

Je colle mon oreille aux rochers, et fermant doucement les yeux, je l’entends couler…

Julie de Muer pour le Bureau des guides du GR2013

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365 km en 13 jours en solitaire

L’intégralité du GR2013 en solo en 13 jours. 

La nouvelle présidente du comité départemental de randonnée pédestre des Bouches-du-Rhône, Marianne Clarté, a parcouru l’intégralité du GR2013 en solo en 13 jours. Entre anecdotes personnelles, diagnostic territorial, confession de randonneuse et analyse d’itinéraire, l’ancienne élue écologiste et militante partage ici sa façon de marcher.

C’était en 2013, je m’étais cassé le bras, j’étais arrêtée, j’avais donc du temps devant moi. Je suis une marcheuse, j’avais entendu parler de ce nouveau sentier. Je me suis dit : « je vais découvrir le territoire en parcourant le GR2013 ». J’étais alors vice-présidente de l’Agam (car élue à la ville de Marseille) et mieux connaître l’aire métropolitaine m’intéressait aussi à ce titre.

Comment avez-vous parcouru l’itinéraire ?

Je voulais le faire toute seule, en entier et de façon suivie. Ayant une famille, je voulais rentrer chez moi chaque soir, en utilisant les transports en commun. On peut donc dire que je l’ai parcouru en « itinérance intermittente ». J’ai commencé par la boucle de Marseille puis j’ai continué à partir de Saint-Marcel vers Aubagne et Aix ; et ensuite la boucle de Berre. J’ai bien souvent fait deux étapes en une, donc une moyenne de 30-40 km de marche par jour; j’ai ainsi parcouru le grand 8 en treize jours, en deux à trois séquences. J’ai fini en décembre 2013, avec une randonnée de Salon à Aix-TGV. Je suis sortie de la gare, il neigeait ! Puis un mistral glacial s’est levé. Pour pique-niquer, cette fois là, je suis entrée dans un bistrot de la Fare-les-Oliviers ; je peux vous dire qu’on m’a regardée avec des yeux ébahis. Et le lendemain, il gelait à pierre fendre à Velaux, ce qui m’a valu une glissade monstre sur une plaque de verglas !

J’ai passé une seule nuit « dehors ». Je m’étais trompée dans mes distances, je voulais aller plus loin, je suis arrivée trop tard à Istres, plus moyen de rentrer à Marseille. Je me suis retrouvée dans un bar où d’aimables messieurs m’ont proposé de m’emmener à la gare de Miramas ; mais ils avaient trop bu pour que j’accepte. J’ai donc appelé un petit hôtel une étoile, qui m’a dit qu’il n’avait plus de place ; j’ai insisté en faisant valoir que je parcourais le GR2013, et là les portes se sont ouvertes : « Ah bon ! Mais j’ai de la place alors ». En fait l’hôtel était quasiment vide. J’avais faim comme après une journée de marche, il m’a indiqué un restaurant où on m’a décongelé un dos de cabillaud.

Et aussi une fois, entre Plan d’Aups et Auriol, où il n’y a guère de transport en commun, j’ai fait du stop – ça se passe bien en général avec un sac à dos.

Dans le TGV d’Aix à Marseille, je dois avouer que je n’ai jamais payé le billet. Les contrôleurs me disaient « Ah, vous faites le GR2013 ! Et puis vous avez un beau sac à dos… Allez, c’est bon, circulez… »

Crédit photo : reportage de Giacomo Furlanetto sur l’étape de Salon-de-Provence à La Fare, dans le cadre du projet Caravan2013 (© 2013 CAUE / Wildproject / Radio Grenouille).

Vous connaissiez déjà bien les Bouches-du-Rhône. Qu’avez-vous découvert ?

J’ai découvert des tas d’endroits. Je n’avais pas pris la mesure de la place de l’eau à Marseille – je pense en particulier à un beau passage en bord d’Huveaune entre la Valentine et Saint-Marcel, ou encore au vallon Dol, le réservoir d’eau dans le massif de l’Etoile. J’ai découvert tous ces quartiers entre Saint-Marcel et Mazargues, avec le canal d’irrigation de beaux jardins partagés. Et dommage, les canaux ont été recouverts dans le 12e arrondissement, mais pour le plaisir des promeneurs et joggers. Dans un genre plus industriel, j’ai énormément aimé la grande passerelle au-dessus de la gare de triage du Canet.

JE ME FAISAIS ABORDER PAR DE NOMBREUX MESSIEURS, SANS COMPRENDRE POURQUOI… PUIS J’AI LU LE TOPOGUIDE ET J’AI COMPRIS

J’ai découvert le village de Grans, que je trouve magnifique, et de beaux endroits sauvages, comme le vallon entre Châteauneuf-les-Martigues et Martigues : si près des grandes zones industrielles et pourtant si silencieux ; mais il a brûlé l’été dernier.

J’ai découvert aussi un drôle de bout de route et de petit bois, au nord de la gare Aix-TGV, « le chemin des Dames » disons… Je me faisais aborder par de nombreux messieurs, sans comprendre pourquoi… puis j’ai lu le topoguide et j’ai compris [rires] !

J’ai pique-niqué dans des endroits parfois bucoliques (comme la corniche du mont Carpiagne au-dessus de la vallée de l’Huveaune, entre Saint-Marcel et Aubagne, ou comme la plage du Ranquet en bordure de l’étang de Berre, un peu avant Istres), mais aussi dans des endroits plus improbables, comme le McDo de Martigues (car je mourais de soif) ou encore à Plan-de-Campagne !

J’ai même découvert un très bel endroit tout près de chez moi : la traverse piétonne Picasso, qui relie le château d’eau au Prado. J’ai aussi aimé la séquence entre le parc Borély et le MAC, dont je me suis resservie récemment pour créer une boucle de 12 km de marche nordique. Et au détour des chemins, que de beaux arbres, on pourrait sans doute en faire un livre à eux seuls.

Crédit photo : reportage de Giacomo Furlanetto sur l’étape de Salon-de-Provence à La Fare, dans le cadre du projet Caravan2013 (© 2013 CAUE / Wildproject / Radio Grenouille).

Qu’avez-vous moins aimé ?

Le pavillonnaire ! J’aime bien l’idée de marcher dans les zones commerciales, ou a proximité des usines, car tôt ça fait partie de la vie. Mais j’ai beaucoup plus de mal avec les zones pavillonnaires, qu’on traverse assez souvent (elles sont nombreuses dans le département) et que je trouve particulièrement tristes. Le pavillonnaire pour moi, c’est d’abord un enfermement, mais c’est aussi une aberration urbanistique, ça dévore du territoire, ça coûte cher en termes de réseaux et de transport. Socialement et écologiquement, c’est tellement moins bien que les petits immeubles de quatre étages au milieu de jardins et parcs partagés !

JE ME SOUVIENS D’UN MOMENT ENNUYEUX : TROP DE GOUDRON ENTRE MEYREUIL ET AIX.

Je me souviens d’un moment ennuyeux : trop de goudron entre Meyreuil et Aix. De temps en temps, j’avais le sentiment qu’on aurait pu passer sur le chemin d’à côté (pour lequel on n’avait peut-être pas encore obtenu l’autorisation de passage du propriétaire). Mais tout cela fait partie des améliorations de l’itinéraire, que nous sommes en train de mettre en œuvre. C’est une situation assez classique dans les GR ; je participais tout récemment à l’inauguration du GR42 (Balcons du Rhône), qui n’a pas de vocation métropolitaine ou urbaine, et qui comporte pourtant bien trop de passages goudronnés du coté d’Arles (propriétaires, publics ou privés, un petit effort pour que la randonnée soit un bel attrait touristique pour notre département).

Je garde en mémoire le départ de Plan d’Aups, assez dur en termes d’entrée de ville.

Avez-vous fait beaucoup de rencontres ?

Quand on parcourt le GR2013, on croise évidemment beaucoup d’habitants, mais je n’ai pas eu l’occasion de rencontrer beaucoup de gens avec qui parler. Je me souviens qu’en arrivant au Plan d’Aou, je buvais à la pipette dans la montée, lorsque des gamins d’une dizaine d’années sont venus vers moi et m’ont dit en souriant « Madame, comment vous boyez? » Il m’a fallu quelques temps pour comprendre qu’ils conjuguaient le verbe boire, mais c’était une rencontre sympathique !

Une fois, je suis passée à la Busserine un après-midi, il y avait du deal en cours ; j’ai compris que je devais changer de trottoir.

Une fois, au départ de la gare Aix-TGV, j’ai croisé un couple de randonneurs qui démarrait leur journée. « Allez, on y va » ; ils s’apprêtaient aux aussi à parcourir l’intégralité du GR2013.

Je n’ai jamais eu peur en tout cas sur le GR2013 ; je dis ça car on me pose souvent la question.

Crédit photo : reportage de Giacomo Furlanetto sur l’étape de Salon-de-Provence à La Fare, dans le cadre du projet Caravan2013 (© 2013 CAUE / Wildproject / Radio Grenouille).

L’expérience du GR2013 était-elle fondamentalement différente des autres GR ?

J’aime bien sentir et écouter mes pas. Il y a un rythme, je me cale dedans. Le GR2013 rend cela possible par la facilité du terrain – bien plus que les Calanques ou la montagne. J’aime la marche quand on peut allonger le pas, se caler sur des belles continuités, faire 30-40 km, parfois plus, sur des terrains assez plats, qui me permettent d’être dans mes pensées. Le cordon dunaire du Jaï permet ça, et également le plateau de Vitrolles, ma dernière étape entre Velaux et la gare d’Aix-TGV.

JE REGRETTE DE NE PAS AVOIR PU ORGANISER DE RANDONNÉE SUR LE GR2013 AVEC LES ÉLUS DU CONSEIL MUNICIPAL DE MARSEILLE.

Une des choses que j’ai aimées avec le GR2013, c’est qu’il est dans la vie, pas dans le pittoresque. Il est dans la vie quotidienne des gens, dans les lieux de travail, de production, de loisir, des lieux de culture aussi comme ce très beau moulin, à proximité d’Auriol, ces bastides dans le 9e arrondissement de Marseille…

J’ai apprécié le passage entre Plan-de-Campagne et les quartiers Nord, on passe par les hauteurs, au-dessus de l’autoroute, avec de grandes vues… un grand moment métropolitain. Ça montre ce que peut vouloir dire une métropole dans toutes ses composantes – infrastructures de transport, zones de production, habitats, nature…

Je regrette de ne pas avoir pu organiser de randonnée sur le GR2013 avec les élus du conseil municipal de Marseille et les collègues de l’Agam – je ne suis pas sûre que beaucoup l’aient pratiqué.

Entretien avec Marianne Clarté publié dans Marsactu

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Vitrolles après le feu

Le Bureau des guides du GR2013 propose une nouvelle chronique qui met en lumière un aspect du territoire de la métropole. Quelque part entre l’enquête et la promenade, la poésie et le diagnostic urbain, les créateurs du sentier vous invitent dans les coulisses du GR2013. Mises bout à bout, toutes ces histoires forment la trame d’une culture métropolitaine partagée. Pour ce troisième épisode, balade sur le feu qui a ravagé Vitrolles.

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Nous avons traversé Vitrolles par la branche sud du GR2013, de la gare d’Arbois TGV au rond-point de Fontblanche, pour la vingtième fois en 5 ans, mais la première fois depuis l’incendie du 10 août.

L’odeur de cendres est là, comme elle était sur Marseille. C’est au bout du premier kilomètre, un peu avant le bord du plateau de Cabriès, qu’apparaissent des taches noires, puis c’est tout le terre plein central de la D9 qui est cramé. Au bord du plateau de Vitrolles, vers le Model Air Club of Aix-en-Provence (Macap), « on a eu chaud », témoigne une dame chargeant à la pelle une brouette de détritus noircis. Tout le plateau est brûlé.

Du Macap jusqu’à l’Infernet, le feu est passé. Le sous-bois a disparu (kermès, argelas, genets), remplacé par une couche de 5 centimètres de cendres. Des archéologies apparaissent, les dalles du camp américain, des barils de fer jetés dans les vallons. Le Stadium n’a rien, mais il est ouvert de tous cotés.

On a un peu refait des balises à l’acrylique liquitex au doigt. On pourrait en profiter pour améliorer la descente au sud des boues rouges, qui est pas mal piégeuse.

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Les arbres ont eu un coup de chaud, surtout des pins, pas sûr qu’ils reprennent tous au printemps. Autour de la source de l’Infernet, le feu est resté, grande tristesse.

Désolation totale. La Cadière coule fort. Même les prêles se délitent en poussière dans la main.

Le chemin de l’Infernet redevient tel qu’avant environ 500 mètres après la source (ou 500 m avant son portail d’entrée).

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Bon, il y avait aussi de jeunes pousses d’herbe verte de 2 cm venues en seulement 10 jours, des abeilles dans les ruches (mais que butinent-elles ?), quelques papillons, sauterelles et oiseaux.

Les vues sur le Plateau nord, d’Arbois TGV à Rognac le font apparaître entièrement désolé, toute la garrigue a brûlé, seules les parcelles en culture autour des fermes de Valbacol et de Monvallon sont intactes.

C’est aussi la première fois que nous faisons ce parcours depuis la disparition de Georges Demouchy au printemps 2016, le paysagiste de l’Epareb qui avait initié la création de ce cheminement, il y a des années, le long des rives de la Cadière, où s’est glissé notre chemin.

Nicolas Mémain, urbaniste gonzo (texte et photos)

En bonus, la carte de la balade

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Numéro 089

Avec 70 autres photographes ayant “adopté” un des points de vue de l’observatoire photogaphique du paysage (OPP) depuis le GR2013, Sébastien Lebret reconduit chaque année une image, depuis le même endroit exact. Il contribue ainsi à une vaste entreprise collective, initiée par Geoffroy Mathieu et Bertrand Stofleth en 2013 dont le but est de documenter l’évolution des paysages métropolitains d’Aix-Marseille Provence de 2013 à 2023.

Sébastien Lebret : Avant toute chose, mettons-nous d’accord. C’est mon paysage. Je ne le partage pas. Si c’est bien clair dès le début, je veux bien répondre à vos questions.

Le Bureau des Guides du GR2013 : Eh bien, d’accord… Quel est le point de vue que vous avez adopté ? Pouvez-vous le décrire ?

Je suis le numéro 089. C’est vers Gardanne, l’écomusée : un terrain de motocross sauvage derrière une ferme. Il y a des arbres au milieu. C’est comme un jardin japonais.. Ou plutôt, c’était. Aujourd’hui, vous voyez une déchèterie pour gravats de chantiers.

Porté par les photographes Bertrand Stofleth et Geoffroy Mathieu, l’ « observatoire photographique du paysage depuis le GR2013″ est né juste avant l’année capitale européenne de la culture. Il vise à photographier de manière extrêmement précise différents paysages, points de vue sur une période de 10 ans, tous les ans. Les clichés des cent sites sont mis en ligne au fur et à mesure sur le site du projet.

Comment l’avez-vous choisi ?

Ou plutôt comment nous sous sommes rencontrés… parce que 089 fait partie de la famille maintenant. Avec mes minots, nous étions les derniers au dernier rendez-vous des adoptants à Vitrolles en 2013. J’ai choisi de ne pas choisir. Mon travail, c’est assistant social. Je voulais un sans-famille, un oublié. Il en restait une dizaine. Geoffroy Mathieu et Bertrand Stofleh nous ont transmis 89. Je ne savais pas alors que c’était le début de la galère…

Comment se passent les reconductions?

Il y a un protocole d’ingénieur pour la prise de vue… Oui, il faut au moins avoir fait l’École des Mines. Coordonnées GPS 43°28, 510’N – 005°27,182’E ; hauteur 157cm ; orientation 208° ; inclinaison 0°H-12,5°V… Alors Geoffroy [Mathieu] m’explique, mais j’ai mes minots autour de moi qui courent dans tous les sens. Je fais oui oui, mais j’ai des palpitations ; je comprends rien. J’ai la pression : la prise de vue doit être validée par Geoffroy! Alors là, je m’adresse à mes collègues adoptants : je ne sais pas pour vous, mais moi, ça me fait vraiment flipper. J’en suis toujours aux photos d’anniversaire ratées : les bougies sont déjà soufflées et les têtes des minots sont coupées en deux. Je ne vais pas y arriver.

Le numéro 089 au fil du temps, les données relatives à la prise de vue sont données dans le cadre sous les photos de Sébastien Lebret. 

Alors, comment se passe le premier essai tant redouté ?

1er essai. Point de vue introuvable même avec le schéma. J’attaque face Nord dans la boue : échec, retraite lamentable. 2e essai. J’ai trouvé. Je sors le trépied de la FNAC à 10€ en solde. Pas moyen de repérer sur le plan l’endroit précis où poser le trépied. Je fais au pif … et paf, le trépied n’est pas assez haut ! J’ai du 130 et il faut du 157. 3e essai. J’ai le bon trépied. J’envoie les photos à Geoffroy : pas validées ! C’est pas bien cadré : il manque un bout de toit en haut à gauche…. Mais vraiment un bout de toit de rien du tout. 4e essai. RE-PAS VALIDE. Bon, c’est vrai, il y a une grosse tâche jaune au milieu de la photo. J’ai pris le soleil de face. 5e essai. Merci Serge, un copain amateur photo. Validé ! 6e essai. Je ne le crois pas. Le jardin japonais se transforme en déchetterie et en plus un grillage passe pile sur l’endroit où je dois prendre la photo ! Je prends la photo avec le grillage. Pas validé ! Je m’étais dit, ça va faire artistique genre redécomposition déconstructiviste du paysage et ben non ! Geoffroy, pas d’accord.

Mais vous avez fini par y arriver ?

7e essai. Comme mon cas est désespéré, Geoffroy vient à mon secours dans sa batmobile et son CANON 10783YZ+++. Nous arrivons au point de vue. Étude du schéma, triangulation, remesurage… Pas moyen de trouver le repère pour prendre la photo. Je suis rassuré, les artistes, ça galère aussi ! Je rigole : les mesures étaient inversées sur le schéma. Mon pif était bon parce qu’au final, Geoffroy prend aussi la photo avec le grillage. Il téléporte direct sa photo dans son portable : validation directe ! Joie intense ! Expérience artistique en live !

Quelles pensées vous viennent en regardant l’évolution de ce point de vue ?

089 est sur le chemin de mon psy. C’est mon rituel : je rends visite à 089 une fois par mois mais après ma séance avec le psy, pas avant. Au retour de ma séance, à ce moment là, je suis encore dans la gamberge… et je me retrouve avec 089 : un grillage avec une déchetterie derrière. Je dois me prendre maintenant d’affection pour des gravats de chantier. Je suis vraiment un loser. Mais je me dis quand même : mon paysage a bien changé.

Propos recueillis par Baptiste Lanaspeze pour le Bureau des guides du GR2013

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Le tour de l’Etang de Berre

Pour cet épisode, le bureau convoque l’ancêtre du GR, inventeur des topoguides, Paul Ruat….  

« Le vrai touriste est celui qui marche. » Elzéard Rougier

Entre 1890 et 1900, le libraire marseillais Paul Ruat publia une série de petits guides (nous appellerions aujourd’hui cela des “topoguides”) décrivant chacun une vingtaine d’excursions (nous dirions des “randonnées”). En dix ans, cette série des Excursions en Provence rassembla environ deux cents promenades autour de Marseille, dans les Bouches-du-Rhône, dans le Vaucluse et dans le Var.

Au beau milieu de cette fièvre de marche, d’écriture et de publication (on dit qu’il se vendit 22 000 exemplaires de ces petits guides), Paul Ruat fonda en 1897 la Société des Excursionnistes marseillais. En 1911, un dernier petit volume (récemment réimprimé par les petits-enfants Tacussel) parut sous le titre Excursions aux environs de Marseille. Un grand nombre de ces excursions concerne des territoires parcourus par le GR®2013.

AVERTISSEMENT : UTILITÉ DES EXCURSIONS

Depuis quelques années, le goût des excursions a pris à Marseille un certain développement. Il faut attribuer ce résultat aux nombreuses sociétés ou groupes excursionnistes qui se sont créés dans notre ville. D’autre part, la rapide extension de l’usage de la bicyclette a aussi contribué à développer ce goût.

Ils sont encore nombreux cependant ceux à qui le salutaire exercice de la marche rendrait d’inappréciables services : employés de magasin, de bureaux, comptables, professeurs ; tous ceux qui par profession ou par devoir restent dedans les six jours la semaine !… Soit par manque d’habitude, soit par manque de renseignements ou relations, la plupart de ces derniers ne savent profiter qu’à demi du jour de liberté qui leur est accordé ; s’ils font une promenade, c’est à la plage du Prado, ou bien à l’Estaque… en tramway ! alors qu’il serait si facile de combiner une charmante course aux environs de la ville.

Nous pensons donc que nos petites brochures faciliteront et développeront encore le goût des excursions ; nous nous sommes appliqué à donner tous les renseignements pratiques propres à intéresser ceux qui n’ont pas l’habitude de se déplacer.

Il n’est pas nécessaire, on le voit, de faire partie d’une société pour excursionner. La meilleure société est, le plus souvent, un ami, ayant les mêmes idées, avec lequel on peut causer et communiquer ses impressions.

Quel plaisir plus agréable, du reste, que de partir le dimanche matin par le premier train ou le premier tramway, s’en aller à la découverte d’un des jolis coins dont notre Provence fourmille ! Une halte autour d’un puits ou d’une source pour le repas champêtre, toujours consommé du meilleur appétit ; une omelette et un lapin sauté dans quelque auberge de village ; voilà pour la partie matérielle. Et l’on rentre le soir, très souvent harassé de fatigue, mais content de sa journée et les poumons remplis d’air pur et salubre.

Que l’on ait des préférences pour l’histoire naturelle ou pour l’archéologie ; que l’on soit botaniste, géologue ou tout simplement touriste, on arrive toujours avec une ample moisson, tant y à glaner dans beau pays !

L’on sait qu’un travail sédentaire prédispose aux maladies du foie, de l’estomac, de la vessie, etc. Une bonne série d’excursions sera donc le plus souvent un remède préventif ou curatif ajouté à l’agrément de la promenade.

La publication des Excursions en Provence contribuera, nous l’espérons, à faire mieux connaître et admirer notre beau pays de Provence. Le faire aimer autant que nous l’aimons : voilà surtout le but que nous nous sommes proposé.

Paul Ruat in Excursions en Provence, 3e série (1894)

Une carte de l'étang de Berre édité par Paul Ruat.
Une carte de l’étang de Berre éditée par Paul Ruat.

LE TOUR DE L’ÉTANG DE BERRE

Renseignements pratiques. – L’excursion autour de l’Étang de Berre est la plus intéressante que l’on puisse faire aux environs immédiats de Marseille, tant du point de vue historique et pittoresque que pour l’étude de la géologie et de la région des étangs.

Afin de la faire avec fruit, on devra employer deux jours pour cette excursion, ou mieux, faire deux excursions séparées. Visiter en une journée la partie nord : Saint-Chamas, Miramas et Istres ; voir ensuite, en une autre journée, la partie sud : Martigues, Port-de-Bouc et Fos. – Il est toutefois possible de faire le tour de l’étang en une seule journée, mais seulement les dimanches et jours de fête, et pendant le service d’été des chemins de fer (de juin à novembre), où il existe à Martigues un train à 9 h du soir qui permet de rentrer à Marseille vers 11h.

Partie nord de l’Étang. – Prendre à Marseille le premier train du matin avec un billet d’aller et retour pour Saint-Chamas. Visiter Saint-Chamas de 8 à 10 h, et aller à Istres à pied (9 km). Deux heures de marche, dont une heure sous une allée de pins.

À Saint-Chamas on trouvera presque toujours un batelier disposé à vous conduire à Istres ; dans ce cas, un excursionniste devra se détacher dès l’arrivée du train pour faire préparer le bateau. Prix : 50 c. à 1 fr. par personne, selon le nombre de passagers.

Istres ; repas à l’hôtel de France. Visiter la ville de 2 à 3 h. Départ à 3 h si l’on vient à pied à Miramas (2 h ½ de marche), ou à 4 h environ avec le train venant de Port-de-Bouc qui correspond à Miramas avec le train arrivant à Marseille vers 7 h du soir. – Il y a aussi un service d’omnibus. Prendre billet simple de Miramas à Saint-Chamas. Dépense : environ 7 francs, y compris le repas ; 4 francs avec port de vivres.

Partie sud de l’Étang. – Prendre à Marseille le premier train du matin, avec un billet d’aller et retour pour Martigues, qui se délivre au guichet n° 2. Pendant le service d’hiver des chemins de fer, on ne pourra que voir Martigues dans la matinée ; y déjeuner à l’hôtel du Cours, et aller l’après-midi, en omnibus, faire une visite à Port-de-Bouc. Pendant le service d’été, au contraire, on prendra à la gare de Martigues l’omnibus d’Istres jusqu’à Saint-Mitre. Après une courte visite de cette localité, on ira à Fos par la route qui passe par Saint-Blaise et le nord de l’étang de Lavalduc ; 2 h ½ de marche, y compris un petit arrêt pour visiter la chapelle Saint-Blaise.

Repas à Fos, hôtel du Commerce. Départ de Fos vers 2 h pour Martigues, trajet en 3 heures environ, y compris une demi-heure d’arrêt à Port-de-Bouc. Facilité pour venir en omnibus à la gare de Fos, (moitié chemin de Port-de-Bouc) et de Port-de-Bouc à Martigues, par la correspondance du chemin de fer. Si l’on fait le trajet à pied, on reviendra de préférence par le chemin de halage qui longe le canal de navigation.

On visitera donc Martigues de 5 à 7 h, et après un bon dîner à l’hôtel du Cours, on en partira à 9 h, pour arriver à Marseille à 11 h du soir. Dépense : service d’hiver, 6 francs ; service d’été, 9 à 10 francs.

Le Tour de l’Étang en une journée. Dimanches et fêtes seulement et pendant le service d’été des chemins de fer.

Prendre le premier train avec un billet d’aller et retour pour Pas-des-Lanciers, et, au chef de train à Pas-des-Lanciers, un billet simple pour Saint-Chamas, – visiter cette ville de 8 à 10 h ; aller ensuite à pied ou en bateau à Istres (repas).

D’Istres à Martigues par Rassuën, Saint-Blaise et Saint-Mitre, on peut compter 4 heures avec les arrêts nécessaires ; on pourrait aussi négliger Saint-Mitre et venir de Saint-Blaise à Port-de-Bouc par les ruines de Castelveyre, le Plan d’Aren et la gare de Fos (recommandé), prendre l’omnibus de Port-de-Bouc à Martigues. – Facilité de prendre à Istres la voiture publique qui part de la place de la Mairie à 2 h et demie, pour arriver à Martigues à 4 h. Visite et départ de Martigues comme il a été dit plus haut. – Enfin, prendre billet simple de Martigues à Pas-des-Lanciers. – Dépense : 10 à 11 francs.

Les personnes qui feront cette excursion en 2 jours coucheront le premier jour à Istres.

Renseignements pour bicyclistes. – Les bicyclistes qui voudront faire cette intéressante excursion n’auront qu’à prendre un billet d’aller et retour pour Pas-des-Lanciers, se rendre de là à Istres par Rognac, Saint-Chamas et Miramas-Gare. Repas à Istres. L’après-midi, retour à Pas-des-Lanciers par Rassuën, Fos, Martigues, Chteauneuf, Marignane et Saint-Victoret. Parcours : 90 kilomètres environ. Terrain à peu près plat.

Paul Ruat, éditeur, auteur, a fondé en 1897 les Excursionnistes marseillais.

Ce texte est extrait de sa série d’ouvrages Excursions en Provence publiés à la fin du 19e siècle, avec l’aimable autorisation de MM. Tacussel. Ce texte sera publié aux éditions Wildproject sous le titre Dix-neuf excursions de Paul Ruat sur le GR®2013 au 19e siècle et une incursion de Paul-Hervé Lavessière.

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Comment se perdre sur un GR

Des outils inédits pour se pencher vers un tourisme des sens, des interprétations et des histoires inventées…

Comment se perdre sur un GR est un carnet de promenades. Il se lit comme un guide de voyage et un cahier de vacances. Il se complète, il s’emporte, ils se détourne. Dans ce carnet, l’agence touriste donne les clés pour se perdre, à bras le corps, sur les 365 km du GR 2013. Elle met à disposition pour l’avantoursite qui est en chacun de nous, des outils inédits pour se pencher vers un tourisme des sens, des interprétations et des histoires inventées.

Le projet nait des explorations artistiques des artistes Mathias Poisson et Virginie Thomas, et prend forme dans le contexte de la Capitale européenne de la culture et dans l’élaboration du GR2013. Il prend plusieurs formes :

Comment se perdre sur un GR : un carnet de promenades. Il se lit comme un guide de voyage et un cahier de vacances. Il se complète, il s’emporte, ils se détourne. Dans ce carnet, l’agence touriste donne les clés pour se perdre, à bras le corps, sur un chemin balisé. Elle met à disposition pour l’avantoursite qui est en chacun de nous, des outils inédits pour se pencher vers un tourisme des sens, des interprétations et des histoires inventées.

Les marches obliques : des rendez-vous d’un ou plusieurs jours de marche-atelier, à travers une ville et ses limites géographiques. À la frontière entre l’atelier de pratique, la performance et le geste artistique, elles proposent, sur un parcours élaboré en amont, d’expérimenter des manières de marcher, de dessiner, d’écrire et de danser à partir d’un arpentage en groupe. Une invitation à cheminer aux frontières de la ville à traverser des espaces en tension, explorer des passages cachés dans le paysage urbain (chemins de traverses, terrains vagues, zones en mutations…), observer le corps en marche, ses sensations et dessiner ensemble une cartographie vécue de la ville par ses marges.

Les Récits retournés : des performances où l’agence touriste raconte à travers des récits et des danses, un territoire qu’elle a explorée.

Suite à la visite fouillée du GR2013, l’Agence touriste restitue, sous forme de performance publique, ses aventures dans un récit débridé à multiples voix, à multiples corps, à multiples points de vues.

Format de poche, 64 pages, 10€
Editions Wildproject. 2013.

Qu’est ce que l’Agence Touriste ?

C’est une agence de promenade expérimentale qui propose d’inventer et de pratiquer un tourisme de travers pour explorer des territoires méconnus (quartiers sans monument, périphéries de villes, lieux intermédiaires). Elle organise des dérives (visites guidées, performances, ateliers) et fabrique des traces de voyage avec les moyens du bord (cartes subjectives, textes, expositions, performances…).

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1001 NUITS

Une constellation de récits…

À partir du GR2013, comment collecter et partager les contes et légendes qui forment le corps métropolitain, réel et mythique ? Comment donner à la métropole un récit de fondation ?

Dans un territoire profondément marqué par une histoire coloniale rarement évoquée, nous réimportons un ouvrage fondateur de l’orientalisme, traduit et en partie réinventé par l’arabisant Antoine Galland. Mobiliser un patrimoine, c’est toujours un pillage. Lever une carte, c’est conquérir un lieu. Tous les récits de fondation sont violents. Nos Mille et une nuits n’échapperont pas à notre condition : elles l’assument, la racontent, la partagent. Espérons que ce soit un petit mal pour un grand bien, une petite violence qui nous rapproche d’une guérison.

Les Mille et une nuits est un recueil anonyme de contes populaires écrits en langue arabe, d’origine persane et indienne, issus d’un recueil perse, vraisemblablement destiné à l’éducation des gouvernants. Trahi par son épouse, le grand sultan d’Inde et de Perse, jusque-là respecté de tous, décide d’épouser chaque soir une femme qu’il tuera à l’aube. La fille de son grand vizir, Shéhérazade, se sacrifie au sultan dans l’espoir de mettre fin au masssacre qui menace le royaume – et ce en lui racontant des histoires, d’aube en aube.

Ça se passe au crépuscule : le moment où l’on bascule du sol au ciel. Le mouvement de l’imaginaire prend le relais du mouvement de la marche. On entre dans l’inconscient collectif, dans les archétypes. Ce qui s’éteint la nuit, c’est le territoire ; mais le paysage est toujours là. Une fois la nuit arrivée, le territoire devient sauvage, physique, les frontières s’estompent.

La nuit, on lève les yeux, la métropole devient visible, dans des constellations.

Des étoiles incommensurables, séparées par des années-lumières, dessinent des formes. Certaines étoiles brillent plus que d’autres : le complexe de Fos, les croisades… D’autres sont plus petites : la planque de Gaëtan Zampa au Ranquet, le périple quotidien du fils de Buffalo Bill au centre de tri, la saveur de la poutargue sous la langue. On fait des liens entre les choses, et ça dessine des figures. La métropole est un archipel, mais aussi une nébuleuse : elle existe dans l’articulation des échelles. Il y aura des anecdotes et des récits de fondation, des pages d’histoire oubliées et des prophéties, et même une préhistoire du futur. Des récits de différentes échelles, sans hiérarchie.

Ces contes métropolitains pour adultes seront, comme tous les récits de fondation, des récits d’amour et de mort.

L’histoire est créée par ceux qui en ont besoin. Nous en avons besoin – donc nous allons l’écrire ensemble. Nous emmenons pour cela les livres de Giono et de Nostradamus, de McKay et de Strabon, de Maurras et de Pythéas, de Bellaud et de Sembène, de Dell’Umbria et de Michel Chevalier. Nous écoutons Lhasa et Keny Arkana. Nous rouvrons les numéros de la revue Café Verre et les récents Récits d’hospitalité.

Pour raconter les contes et légendes de la métropole marseillaise, il faut aller bien au-delà de l’histoire de France.

Baptiste Lanaspeze

Lire Ventilo HORS-SÉRIE N°1

Lire Ventilo HORS-SÉRIE N°2

Lire Ventilo HORS-SÉRIE N°3

Pléiades : groupe de sept étoiles qui constitue un petit amas très groupé dans la constellation du Taureau et bien visible les nuits d’hiver.

Par glissement, groupe de sept poètes français du 16ème siècle.

Dérivé : une pléiade, une grande quantité.

Les pléiades sont des divagations littéraires à partir d’un lieu. Les illustrations et extraits de textes réunis dans ces livrets ont été rassemblés par l’équipe du Bureau des guides pour chaque rendez-vous des 1001 NUITS. Ils nous parlent de géographie, de géologie, d’hydrographie, d’histoire, de biologie, de politique, de choses savantes mais également de littérature, de témoignages et de poésie, d’ici et d’ailleurs, d’évènements passés ou à venir.

Ils permettent de raconter le lieu où nous nous sommes réunis chaque soir pour regarder ensemble le soleil se coucher. Ils sont destinés à être lus face au couchant par les marcheurs présents lors de ces soirées.

C’est une entreprise sans fin que d’assembler ces textes, c’est également un exercice passionnant que de les rechercher et une joie de les découvrir et de les poser côte à côte. Ces recueils ont été notre manière de retranscrire nos découvertes et nos intuitions. Un chemin pour imaginer avec les artistes invités autant de soirées dans tous ces endroits insolites où nous vous avons convié.

Avec ces mille et une histoires c’est autant une constellation qu’un portrait qui se dessine.

L’équipe du Bureau des guides du GR2013

19 pléiades ont été réalisées et distribuées au public lors des rendez-vous durant ces six mois.

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