Paysages usagés : exposition, conférences et marches

Du 09 février au 02 mars 2024

Après dix années d’observation photographique des paysages de la métropole marseillaise depuis le sentier de grande randonnée GR2013, l’exposition Paysages Usagés propose de découvrir cette œuvre collaborative à travers une installation qui met en scène cette ressource documentaire avec les archives du projet, où les récits des « adoptants » des points de vue se mêlent aux interviews d’auteurs et penseurs invités à commenter les images.

L’IMVT ouvrira ses portes au public pour proposer 4 temps de conversations, afin d’apprendre ensemble à lire l’évolution de nos paysages métropolitains.

Au programme un vendredi soir de conférence avec des invités suivi d’une balade le lendemain pour découvrir certains points de vues du territoire à partir du regard d’étudiant·es en architecture accompagnés des conférenciers et de Nicolas Memain.

Conférences à l’IMVT

9 février : Paul-Hervé Lavessière, géographe et urbaniste & René Borruey, architecte et historien

16 février : Sabine Barles, professeure d’urbanisme et aménagement & Matthieu Duperrex, philosophe et auteur

23 février : Frédérique Mocquet, architecte et chercheuse & Baptiste Lanaspeze, éditeur et auteur

1er mars : Sarah Vanuxem, autrice et chercheuse en droit & Véronique Mure, botaniste et ingénieure en agronomie

Exposition au Centre Photographique

En parallèle de ce cycle (re)découvrez l’exposition Paysages usagés de Geoffroy Mathieu et Bertrand Stofleth.

CENTRE PHOTOGRAPHIQUE MARSEILLE
74 rue de la Joliette, 13002 Marseille
du mercredi au samedi de 14h à 19h.

Marches dans les paysages

ENTRE-DEUX VILLES : 4 balades qui se jouent à minimum 5 joueur·ses au cours d’une journée d’hiver entre deux villes situées sur le GR2013, le lendemain d’une conférence à l’IMVT avec des chercheurs-commentateurs de l’Observatoire Photographique des Paysages.

Dates :

samedi 10 février : entre Aubagne et Marseille par la vallée de l’Huveaune,une marche de Napollon à la Penne-sur-Huveaune.

samedi 17 février : entre Vitrolles et Aix à travers le plateau de l’Arbois, une marche de Aix-TGV à la Duranne. ( inscription )

samedi 24 février : entre Vitrolles et Martigues en suivant les eaux de la Cadière, une marche de Pas-des-lanciers à Marignane. ( inscription )

samedi 2 mars : entre Châteauneuf-les-Martigues et Lavera à travers le massif du Rove, une marche du Bolmon à la plaine de Saint-Julien. ( inscription )

Vous pouvez choisir entre plusieurs rôles dans le jeu :

L’Adoptant·e

Vous êtes habitant•e d’une des communes traversées par le GR2013.

Choisissez l’un des 70 points de vue de l’Observatoire Photographique des Paysages.
Tous les ans rendez visite à votre point de vue, seul ou entre ami•es, et réalisez la reconduction du point de vue que vous avez adopté.
De temps en temps rejoignez les photographes ou l’apéro-diapo au cours duquel vous pourrez présenter vos observations et échanger avec d’autres adoptants.

L’Étudiant•e

Vous êtes étudiant•es à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille.

Choisissez un « entre deux villes » qui vous inspire dans la métropole marseillaise.
Identifiez les points des vue de l’Observatoire Photographique du Paysage qui s’y trouvent.
Explorez, documentez, questionnez ce que vous voyez en allant arpenter.
Elaborez un itinéraire de moins de 10 km qui raconte votre enquête et vos désirs.

Le ou la Chercheur·se

Vous êtes  un chercheur qui aime frotter son champ de recherche au territoire 

Vous avez contribué à mettre en réflexion les 10 ans de points du vue de l’Observatoire Photographique du Paysage.
Choisissez l’un des itinéraires des étudiant•es dans lequel se trouve quelques points de vue des adoptants.
Mettez-vous en attention sensible des paysages et des histoires qui vous seront partagés.
Entrez dans la conversation quand cela vous semble opportun.

L’Artiste-marcheur•se

Vous êtes l’un des artistes-marcheurs du Bureau des guides.

Vous avez beaucoup arpenté la métropole marseillaise.
Vous aimez rencontrer des savoirs divers, improviser des conversations situées, accompagner la pensée chercheuse et l’exploration apprenante.
Assemblez les itinéraires des étudiant•es, les réflexions de chercheurs, les rencontres fortuites et les conversations furtives.

Vous

Vous êtes le·a lecteur·trice de ces règles du jeu.

Vous avez vu ou avez envie de voir l’exposition Paysages usagés.
Vous aimez les chemins buissonniers et les écoles sans murs.
Venez contribuer à usager nos paysages avec vos pieds, vos regards, vos savoirs!

Ce cycle de conférences et de marches est proposé conjointement par l’ensa•marseille, l’ENSP, l’IUAR et le Bureau des guides du GR2013 à l’Institut Méditerranéen de la Ville et des Territoires (IMVT).

Retrouver le ruisseau

Une exposition collective autour du fleuve Caravelle Aygalades

Du 12 janvier au 3 février 2024

RENOUER AVEC LA CANNE DE PROVENCE

Depuis la nuit des temps, la canne de Provence est la plante à tout faire des civilisations méditerranéennes. Elle nous accompagne si bien et depuis si longtemps que mille gestes ont été produits pour la travailler. Au l du temps, elle a pourtant été délaissée pour le plastique qui, petit à petit, l’a remplacée. Aujourd’hui, elle est devenue envahissante, notamment le long des berges et dans les milieux humides, où elle pose des problèmes de gestion. Ainsi, l’abandon et le manque d’usage ont fait disparaître ses vertus et disqualié la canne. Partant de ce constat, le collectif d’artistes SAFI développe, depuis plusieurs années, des pratiques qui jardinent les canniers et restaurent nos liens avec la canne de Provence. Cette exposition présente l’état de leur recherche et les actions qu’ils développent avec le collectif des Gammares, des habitants et des structures installées, de Septèmes-les-Vallons à Marseille, pour prendre soin de la ressource et de la rivière.

Une exposition du Collectif SAFI, proposée par le Bureau des guides du GR2013, en partenariat avec le collectif des Gammares et soutenue par l’EPAGE HuCA.

CHEMIN [CARAVELLE]

Le Centre social La Gavotte Peyret sensibilise les jeunes du quartier depuis plusieurs années au euve côtier La Caravelle. En 2020, lors de sa première résidence « Rouvrir le Monde » à Septèmes-les-Vallons, le photographe Vincent Beaume propose à ces jeunes adolescents de cheminer le long de la Caravelle pendant deux semaines. Le premier jour, Vincent les invite dans une camera obscura de 9m2 installée dans le paysage. Pour « comprendre la lumière », commencer par le noir. Découvrir la magie de la formation d’une image. Sortir au jour en fermant les yeux et sentir la lumière du paysage sur sa peau. Intégrer la lumière comme sensation. Découvrir l’ombre et ses volumes. Découvrir le paysage comme sculpture mouvante. Le deuxième jour la tribu s’aventure sur les chemins le long de la Caravelle. Les pieds apprennent la terre sèche, la poussière, l’humus… Les adolescents et Vincent cheminent avec une valise en carton remplie de quinze boîtes en métal qui possèdent chacune un tout petit trou. C’est par ces toutes petites fenêtres circulaires que les jeunes laisseront entrer la lumière de leur paysage choisi et créeront ainsi, des photographies.

Un projet réalisé par Vincent Beaume et les jeunes de la Gavotte Peyret dans le cadre d’une résidence « Rouvrir le monde » dispositif de la DRAC PACA dans le cadre de l’été culturel du Ministère de la Culture. Une exposition soutenue par l’EPAGE HuCA


Samedi 20 janvier
Tout public à partir de 10 ans


Conférence Arundo donax et ses outils / 14h-15H30
Le Collectif SAFI nous raconte l’écologie étonnante de la canne de Provence, ses usages multiples à travers le temps et les outils pour la travailler, dont beaucoup ont aujourd’hui disparu. Il présente également les outils, qu’ils ont conçus et fabriqués, pour relancer le travail de cette plante, considérée aujourd’hui comme invasive.

Suivie de la visite d’un cannier / 16h -17h30
Une petite marche d’approche nous invite à aller à la rencontre des aménagements en canne de Provence réalisés, au bord de la Caravelle dans le du Vallon du Maire à Septèmes, dans le cadre des ateliers réguliers que mène le Collectif SAFI et nous propose une démonstration de leur collection d’outils de travail de la canne pour prendre soin des berges.

Paysages Usagés

Une exposition du 8 décembre 2023 au 02 mars 2024

 

Paysages usagés, Observatoire Photographique du Paysage depuis le GR2013 a été créé à l’initiative de Geoffroy Mathieu et Bertrand Stofleth en 2012, à l’occasion de Marseille Provence, Capitale européenne de la culture. Projet photographique collaboratif incluant artistes, marcheurs, habitants et chercheurs, Paysages Usagés documente un territoire métropolitain en construction, soumis aux pressions anthropiques qui façonnent nos paysages : les apports et les retraits de matière, les transformations, mutations ou latences liés à l’aménagement, à la protection ou à l’abandon des espaces et des milieux. 

Les 100 photographies sont réalisées le long des 365 km du sentier métropolitain GR2013 en intégrant son tracé par un trait blanc qui parcourt l’image et qui s’efface année après année. Pendant 10 ans, chaque année, les artistes ont rephotographié à l’identique 30 points de vue et ont confié les 70 autres à des Adoptant.e.s qui ont assuré les reconductions de leurs points de vue.

Les séries diachroniques obtenues sont à considérer comme un agencement de moments qui s’inscrivent dans l’épaisseur des époques et des lieux. Chaque image prise séparément est l’occasion de ralentir pour un instant la course du temps et de s’attarder sur les micro-changements qui révèlent les dynamiques du monde. La série photographique peut au-delà de l’illustration inscrire l’image comme outil critique. Car c’est ainsi que la photographie est considérée, comme un art éminemment politique, qui permet de mettre en débat et en discussion avec les spectateurs nos rapports au monde ; une invitation à la réflexion sur des paysages qui semblent tout à la fois « s’enruiner » sous les effets du capitalocène, et se réinventer par la poésie des usages. 

« À l’heure de ce premier bilan, nous avons travaillé cette matière brute en pensant y retrouver ce que nous y projetions. Mais nous n’imaginions pas à quel point depuis 2012, nos regards étaient changés par l’état du monde et à quel point les humanités écologiques[1] avaient bouleversé nos perceptions et analyses des dynamiques paysagères mises en lumière par les séries. Il nous a alors paru indispensable de le soumettre aux commentaires, en premier lieu des adoptant.e.s qui nous ont accompagné.e.s mais aussi, pour cette exposition et cette édition, à ces personnalités qui par leurs écrits, leurs actions et leurs engagements ont accompagné les métamorphoses de nos regards sur le monde ».

[1] Les Humanités écologiques constituent un champ interdisciplinaire émergeant dans les sphères de la recherche et de l’enseignement. Ces travaux visent à repenser les rapports entre l’être humain et son environnement, entre « nature » et « culture », en construisant une nouvelle éthique de la connectivité. 

Paysages Usagés est une commande publique du ministère de la Culture et de la Communication – Centre national des arts plastiques, coproduction Marseille Provence 2013, Capitale Européenne de la Culture. 

Partenaires de l’exposition et du livre : Centre Photographique Marseille, Métropole Aix-Marseille-Provence, FRAC Paca, festival Photo Marseille, le bureau des guides du GR2013, Institut méditerranéen de la ville et des territoires. 

La trilogie plastique #1

Plastique, où es-tu, m’entends-tu, que dis-tu?

Une balade pour se rassembler avec le Laboratoire plastique de Pamparigouste sur les rives des communes d’Istres et de Saint Mitre.
Un littoral en mode cabanons viabilisés, un massif protégé, quelques kayaks et deux campings avec plage. Nous sommes à l’étang de Berre et les usines pétrochimiques semblent bien lointaines, presque effacées vues de cette partie préservée de la lagune.
C’est pourtant sur ces rivages et dans ces forêts où chemine presque joyeusement l’eau du canal que nous partagerons la première assemblée du Laboratoire Plastique de Pamparigouste et pisterons les traces du monde plastique bien présent de l’étang.

Alors que l’étang de Berre s’était discrètement éclipsé des pages de l’atlas routier Michelin, une équipe motivée et enthousiaste s’était rassemblée pour profiter de ce “trou dans la carte”, et partir à la recherche de l’île de Pamparigouste. Cette énigme cartographique, une brèche dans notre vision moderne façonnée par le pétrole et les autoroutes, nous ouvrait le chemin vers d’autres histoires, à commencer par celle d’une oasis mystérieuse et féerique, écho improbable à cette vieille légende provençale de Pamparigouste.
Depuis maintenant 4 ans que cet équipage explore, parfois en naviguant sur les rives parfois en marchant sur l’eau, c’est un récit du plastique qui a finalement ré-organisé cette aventure de la désorientation.
Au cours de la quête vers Pamparigouste, une rencontre improbable a eu lieu : les membres du TARA, la célèbre goélette qui sillonne les mers traquant les plastiques et microplastiques à l’international, sont venus nous rendre visite sur la lagune.
Dans ce territoire où la pétrochimie a connu ses débuts, son âge d’or et aujourd’hui sa lente déprise, on s’est rendu compte au fil des conversations que l’on connaissait finalement peu de choses sur la présence du plastique non seulement dans nos interdépendances les plus quotidiennes mais aussi dans les rives et l’étang qu’elles bordent. Rejoints par des scientifiques, les bases de voiles et des associations riveraines, l’équipage décide alors de se recomposer en Laboratoire pour pister ce que ces plastiques disent de nos sociétés.

Comment un laboratoire peut aussi être l’occasion d’assembler des communautés de l’étang ? Comment les différentes recherches menées, artistiques, scientifiques, sociologiques, citoyennes, peuvent-elles être plastiques elles-mêmes et s’infléchir les unes les autres ?
Comment la recherche elle-même peut-elle permettre aux riverain.e.s de l’étang de se constituer en société concernée avec les chercheur.euse.s ?
Comment la science participative peut-elle faire émerger de nouvelles questions et de nouvelles manières d’enquêter, plus proches du type de savoirs et de pratiques de recherche dont nous avons besoin pour mieux s’accorder aux exigences de notre époque ?
Après plusieurs mois de recherches croisées, les artistes, citoyens et chercheurs du Laboratoire se retrouvent et vous invitent à rejoindre une première marche-assemblée.
On y partagera au cours de la balade leurs travaux, leurs trouvailles, leurs réflexions et leurs questions.

Avec le Bureau des guides du GR2013, les scientifiques de L’Institut Écocitoyen pour la Connaissance des Pollutions et des participants à L’observatoire citoyen de l’environnement VOCE, Christelle Gramaglia sociologue à l’INRAE-Montpellier, Sylvain Rigaud du laboratoire Chrome de l’Université de Nîmes et le GIPREB, les artistes du Collectif SAFI, Maxime Paulet, Sylvain Maestraggi et Camille Fallet. Avec la contribution des associations 8 vies pour la planète, Nostamar, Wings of ocean, Karwan, en partenariat avec les communes et bases nautiques riveraines.
La Laboratoire Plastique de Pamparigouste est une recherche-action soutenue par la Fondation de France dans le cadre du programme « Les futurs des mondes du littoral et de la mer 2022 » et par le Ministère de la culture.

Rembobiner le paysage

2/06/2023 : Rembobiner l’autoroute nord

attention, grosse journée avec 16 km.
on longera comme on peut l’autoroute Nord de Marseille,
à la recherche de traces figées de l’ancien terroir,
jusqu’à Saint-Antoine, où l’on prendra le bus 97 
qui nous ramènera Porte d’Aix.
dans le bus, on se demandera si cette expérience de terrain aura enrichi notre relation à l’autoroute Nord et à son paysage.

09/11/2023 : Rembobiner le littoral nord

Il s’agit d’une tentative de série de rembobinages de paysages : à l’aller à pied, au retour en transports en commun.

Suite de Rembobiner l’Autoroute Nord.

Précède Rembobiner l’Autoroute d’Aubagne.

Aussi le constat de l’impossibilité de rentrer dans l’emprise du Port, et là l’envie de faire un audioguide de ce paysage vu depuis le bus 35. 

Aussi bien sûr de participer aux débats en cours sur les petites possibles ouvertures à venir du Port au grand public.

13/01/2024 : Rembobiner l’autoroute Est // Annulée

Il s’agit d’une tentative de série de rembobinages de paysages : à l’aller à pied, au retour en transports en commun.

Rendez-vous près d’un arbre qui a l’air de sortir d’une imprimante 3D.

Sur le plan auditif : casques anti-bruit fournis, prévoyez des bouchons d’oreilles si vous pensez que c’est plus confortable.

Sur le plan visuel : on regardera les surprises de bords d’autoroute.

Du parc du 26e centenaire à la Valentine.

Ces balades font partie d’un cycle de balades « Rembobiner » qui par l’usage combiné des transports et de nos pieds se proposent d’augmenter nos relations aux grandes infrastructures qui composent nos usages et nos paysages.

Le GR2013 de la métropole d’Aix-Marseille, un sentier pour contribuer à faire société

Tribune publiée dans le journal Libération le 30 juillet 2023

Le sentier de randonnée métropolitain qui relie trente-huit communes autour de Marseille fête cette année son dixième anniversaire. Plus qu’une simple marche, ce chemin vise à révéler les interdépendances et les fractures du territoire.

Le GR2013, un sentier de randonnée dit «métropolitain», célèbre cette année ses 10 ans. Ce qui le différencie des GR plus classiques, c’est qu’il est urbain et périurbain certes, mais surtout qu’il prend explicitement acte du fait que tout sentier de randonnée constitue un récit de territoire. En donnant à voir certaines choses et en omettant d’autres, un sentier peut donner aux paysages qu’il traverse la capacité de nous faire penser. Le tracé du sentier dessine deux boucles autour de l’étang de Berre et du massif de l’Etoile, reliant trente-huit communes de ce qui allait devenir la métropole d’Aix-Marseille. Elles se rejoignent en un signe de l’infini à la gare d’Aix-en-Provence TGV, posée sur le plateau de l’Arbois. C’est une infrastructure physique légère : un tracé sur les cartes IGN, l’assurance d’une continuité pédestre, des balises rouge et or, un topoguide.

Cette infrastructure révèle une vérité trop souvent oubliée : quelles que soient les assignations et ségrégations spatiales, nous sommes toujours sur le même sol. C’est sur un même sol que se dressent les résidences fermées du sud de Marseille, les cités précarisées des quartiers Nord, les zones commerciales de Vitrolles, de Plan-de-Campagne, d’Aix-la-Pioline ou encore les zones industrielles du pourtour de l’étang de Berre. C’est encore sur ce même sol que se dressent les massifs du Garlaban, de l’Etoile, de la Nerthe et de la Fare, que coulent la Cadière, la Touloubre, l’Arc, l’Huveaune et les petits fleuves côtiers comme le ruisseau des Aygalades.

Monde social très fragmenté

Le GR est l’ébauche d’une enquête, toujours à reprendre, consistant à pister les interdépendances entre toutes ces réalités qui paraissent lointaines, fragmentaires et parfois même incompatibles. Comment sort-on aujourd’hui à pied d’une ville comme Marseille ? Quelles réalités foncières traversent les infrastructures d’adduction de l’eau potable ? Comment franchir une autoroute ? Est-ce possible de se faufiler entre les golfs et les résidences privés jusqu’aux terres agricoles qui restent ? Qu’est-ce qui concentre aux mêmes endroits stands de tirs, aires d’accueil de gens de voyages, transformateurs électriques, lieux de cruising gay ou encore décharges officielles et sauvages alors qu’ailleurs se concentre la richesse ? Comment passe-t-on d’un monde à l’autre ?

Il ne s’agit pas de nier les frontières invisibles que produisent un monde social très fragmenté ou les logiques de zonages urbanistiques et économiques qui composent l’espace métropolitain. Il s’agit plutôt de comprendre par l’expérience physique et sensible comment ces fragmentations se matérialisent, par quelles opérations elles prennent corps, mais aussi de se rappeler que toujours les vies débordent ces zonages. Au milieu de la zone commerciale de la Valentine, le vieux village se cache ; dans l’enceinte de l’aéroport, les oiseaux habitent les anciens salins du Lion ; dans les forêts domaniales de Septèmes, une carrière Lafarge capte les sources d’un cours d’eau… Sous les zonages, les terres communes – pour le meilleur et pour le pire. Depuis la création du GR dans le contexte de la Capitale européenne de la culture, ce sentier hybride est un espace depuis lequel on peut contribuer à faire société. De même que le GR2013 participe à déjouer l’impuissance face aux assignations spatiales, explorer et expérimenter l’activation d’un tel sentier demande de refuser les assignations disciplinaires.

Tantôt équipement culturel, tantôt école buissonnière, parfois zone à ménager (ZAM), support de constructions d’«hospitalité» ou même «tiers-lieu de plein air», il a fallu multiplier les manières de nommer le sentier pour en comprendre les potentialités. Ces randonnées se rapprochent parfois de pratiques d’éducation populaire, parfois des arts de la rue ou du paysage, parfois du séminaire d’écologie politique. Elles flirtent avec les sciences participatives comme espace de veille territoriale. Elles se font aussi carnaval, ferment de micro-communautés émergentes.

Une manière de se relier

Dans tous les cas, ces marches sont une Tribune publiée dans le journal Libération le 30 juillet 2023invitation à aller dehors, collectivement, à enquêter sur les lieux qu’on habite, à pister les interdépendances territoriales, à se raconter les myriades d’histoires qui fabriquent quotidiennement tout milieu de vie. Ces marches croient en l’importance de la mise en commun de la diversité de nos savoirs. Si l’on veut que les terres soient communes pour le meilleur et pas que pour le pire, il faut apprendre à faire communauté.

Marcher est devenu une manière de se relier, métaphoriquement et physiquement, de redistribuer la hiérarchie habituelle des savoirs (l’agent de sécurité apprendra à la philosophe, l’écologiste écoutera attentivement le collectif habitant autour de tel vallon, l’urbaniste passera la journée les pieds dans le ruisseau qu’il n’a vu qu’en carte et s’en laissera émouvoir). Mais on ne peut prédire à l’avance ce dont cette redistribution nous rendra capable. Ces marches sont un pari sur le fait qu’apprendre à faire sens en commun est susceptible de nous rendre plus résilients – intimement, collectivement, écologiquement.

Une proposition qui mise sur notre capacité à faire sens en commun, sans prédire ce que cette capacité devrait rendre possible, c’est ce que la philosophe Isabelle Stengers appelle un «dispositif génératif», et qui appartient aux arts de la palabre. Ces arts participent, suggère-t-elle, à la résurgence des communs, comme capacité à lutter contre les formes d’accaparement et de destruction auxquelles nous faisons face. Dix années d’expérimentations à partir du GR2013 ont permis de donner de la force à cette hypothèse. La marche collective comme palabre ça commence très simplement, c’est partir marcher et se raconter des histoires. Et de proche en proche, dans le temps long du processus, se réinventent (ou se redécouvrent) de potentiels communs territoriaux.

par Antoine Devillet et Julie de Muer

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Randonnée en terres agricoles

L’enjeu de la ville nourricière est une question majeure que rencontrent aujourd’hui les métropoles.

Préservation foncière mais aussi nécessité d’engager des pratiques plus respectueuses des milieux et des ressources, retrouver le sens de la terre nous invite à arpenter ces territoires agricoles pour en comprendre l’histoire longue, souvent imbriquée dans des histoires de développement urbain et industriel.
Berre-l’Etang est ainsi une commune de la métropole où l’agriculture a traversé le temps depuis l’antiquité, embrassant au fil des siècles la modernisation des techniques, les déplacements des zones de production et qui se trouve aujourd’hui au coeur des enjeux à la fois économiques et écologiques du territoire.
A l’occasion des Journées Européennes du patrimoine, la commune de Berre-l’Étang et le Bureau des guides s’associent et imaginent avec les habitants une balade pour découvrir les terres agricoles, leur passé et leur devenir, à partir de leurs paysages. On y rencontra au côté de Nicolas Mémain des voix d’habitants, d’agriculteurs et de chercheurs pour un portrait vivant et complexe de la plaine berroise.

Cette balade s’inscrit dans le programme « Pensez avec les pieds » du Bureau des guides et dans les Journées Européennes du Patrimoine « L’agriculture berroise, patrimoine vivant » organisées par la Ville de Berre – l’Etang.

Mathias Ben Achour

Guide autodidacte, marseillais tous les jours depuis les années 1990

Mathias propose des balades urbaines historiques à tout type de publics.
Récemment diplômé en Histoire à l’université Aix-Marseille, les balades et spectacles proposés ont pour but de mettre en valeur le patrimoine marseillais et son histoire. Balades traditionnelles, balades sonores ou théâtrales, il multiplie les formes d’expressions pour toucher un maximum de personnes, mais surtout pour ne jamais s’ennuyer.