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Les compagnons de route…
Les compagnons de route…
À propos du GR2013
Balade du centre commercial de Plan-de-Campagne à celui de Grand Littoral (Les Pennes-Mirabeau, Septêmes-les-Vallons, Marseille).
Mardi 21 avril 2015 – LE GRAND NORD : Du centre commercial de Plan-de-Campagne au centre commercial Grand Littoral
D’une zone commerciale à l’autre, de la frontière communale Cabriès / Les Pennes-Mirabeau à Marseille à travers Septèmes-les- Vallons, de CPA à MPM, du coeur de la métropole à l’entrée de grande ville, des bords du plateau de l’Arbois à la vallée des Aygalades, à travers les autoroutes, le canal et les lignes à haute tension.
A cette altitude-là, le dôme de pollution grisâtre qui colle à Marseille se repère avant le rivage . Puis des zébrures laissées par les sillages de toujours plus de navires rayent la mer qui soudain laisse place à la terre – plutôt au béton d’ailleurs. Le couloir de migration méditerranéen ramène au printemps les canards partis hiverner en Afrique. Depuis la rive, il ne leur faut pas cinq minutes pour atteindre le centre commercial de Plan-de-Campagne, qu’ils laisseront derrière eux pour aller se poser sur les premiers lacs des Alpes, loin des mouvements des hommes. Derrière un coteau, sur fond de campagne d’Aix-en-Provence, apparaissent d’immenses boîtes plates et colorées posées sur du goudron noir.
Au musée des temps modernes
Le car dépose les randonneurs de la mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence sur un rond-point, entre Leclerc et Leroy-Merlin. Le centre commercial est le musée d’une époque, l’actuelle, où rien n’est encore assez vieux pour faire œuvre d’art et où l’on s’approvisionne de tout, surtout de trucs à faire et à raconter. Marseille et son pourtour compte d’ailleurs bien plus de centres commerciaux que de musées. On pourrait faire ici le musée des centres commerciaux tant leur évolution y est sédimentée.
Le plus ancien est Plan-de-Campagne. Dans cette forêt de panneaux publicitaires, les voitures se déversent par le torrent de l’avenue centrale jusqu’aux grands lacs de bitume des parkings. A 20 km de Marseille, l’une des plus grandes zones commerciales de France est née en 1960 sur le modèle américain, par l’investissement de quelques pieds-noirs, sur d’anciens terrains maraîchers entourés de marécages où elle n’a ensuite pas cessé de s’étendre.
La troupe de marcheurs traverse la zone comme des géologues parcourent un gisement de foraminifères en haute altitude : avec la fascination contenue des experts. Les clients du centre commercial habitent Port-de-Bouc, Martigues, Bouc-Bel-Air, Vitrolles, toutes ces villes nouvelles périphériques et industrielles où les ouvriers plongeaient dans le rêve pavillonnaire des années 70, à l’époque du tout voiture. Parmi les fidèles, il y a aussi ces Marseillais des quartiers pavillonnaires du nord qui ne veulent pas fréquenter le même centre que ceux vivant dans les cités qu’ils ont quittées. Consommateurs et salariés : la foule urbaine de Plan-de-Campagne ne vit que le jour dans cette ville postiche. «Il y a eu un urbanisme commercial spontané, bête noire de la DDE [Direction départementale de l’équipement, ndlr] qui a puni cet endroit en mettant des autoroutes partout», plaisante Laurent Couture, de l’Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise. La stratégie récente est plutôt de «réinvestir massivement dans une offre de centre-ville à Marseille». Sans parler de l’impact certain du e-commerce. «Il y a deux fois plus de création de mètres carrés commerciaux que de besoins de pouvoir d’achat. Il y aura des morts, c’est une fuite en avant»,tranche Vincent Fouchier le directeur de la mission interministérielle. La victime sera un centre commercial. Lequel ? Quand ? Les duels ont toujours lieu à la fin des westerns.
Jean-Christophe Robert, président de l’association Filière paysanne, verrait bien Plan-de-Campagne revenir à la campagne, avec «des cultures pour une politique alimentaire territoriale». Mais une gare est dans les tuyaux. «Si on fait la gare, c’est pour assumer l’urbanisation», fait remarquer Vincent Fouchier.
Les marcheurs traversent en file le parking principal, grand comme quatre terrains de foot. Deux femmes se disputent pour une histoire de priorité. La nuit, de grandes manifestations de tuning ont lieu ici un vendredi par mois – sauvages mais tolérées. Des courses de voitures imitent celles des films américains, des filles y donnent le départ, comme des pom-pom girls marseillaises. Des transactions sont parfois effectuées la nuit entre voyous, dans le calme du début de semaine.
«Far West»
Le groupe s’enfonce dans des herbes hautes. La sortie de Plan-de-Campagne se fait sur une colline chatouillée par l’autoroute. Sous les «piliers en proue de bateau et les rambardes transatlantiques» du pont autoroutier que nous montre Nicolas Mémain, «street jockey», co-concepteur du sentier GR 2013 qui traverse la métropole, le flux incessant des voitures passe, indifférent comme l’écume.
De la ligne de crête qui marque la frontière entre la communauté du pays d’Aix et la communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole, l’urbaniste David Mangin voit une ville prendre ici la place du «Far West». On plisse les yeux et on imagine une ville dense, lumineuse, avec quelques toits végétalisés ; dans le ciel, des ballons dirigeables transporteurs de grosses charges comme ceux qui seront développés bientôt autour de l’étang de Berre.
Etirée par groupes de discussion, la troupe progresse vers Marseille en traversant des champs, des pins, puis une série de maisons identiques placées comme les spectateurs d’un théâtre – autoconstruction coopérative des Castors.
Avec l’autoroute à ses pieds, on peut d’ici aller travailler vers Aix aussi bien que vers Marseille ou l’étang de Berre. Un facteur sans casque roule d’une maison à une autre. C’est une vie de village, sans église ni mairie, mais avec des terrains de tennis, une école et un bon réseau de fibre optique.
L’ambiance fait place à une nouvelle quiétude pavillonnaire. Ce lotissement années 30 est un ensemble spontané où se logea la main-d’œuvre fabriquant les tuiles mécaniques provençales. Une immigration italienne et espagnole dont les boîtes aux lettres portent encore la trace. Déménager n’a pas été nécessaire aux héritiers pour assouvir une ascension sociale : le délitement immuable des structures sociales des quartiers Nord de Marseille tout proches a fortifié leur statut social. Derrière les portails videosurveillés, de gros aboiements de molosses laissent deviner aux promeneurs de passage l’état d’esprit probable des gens d’ici : la peur du déclassement.
Enfilade de cités
C’est au bout d’une descente bucolique à travers les herbes hautes et les iris mauves que saute aux yeux ce contre quoi on se protégeait plus haut : Marseille. Le quartier Notre-Dame-Limite, sur l’autre rive de l’autoroute, et derrière, Kallisté, cité très dégradée.
Succession de maisons de ville, familiales, pour certaines même avec de grands jardins, et des potagers collectifs. Un parc linéaire aménagé au-dessus du canal de Marseille borde pergolas et maisons de style colonial, on croise les promeneurs du quartier. Passés le moulin et un pont ferroviaire à voûte biseautée, la troupe pénètre le premier noyau villageois avec ses maisons sur deux à trois étages, son église et ses commerces de proximité. Puis elle effleure le ruisseau des Aygalades avant de s’élever vers la cité du Plan d’Aou, en passant par la Gare Franche, lieu culturel installé dans une de ces grandes bastides du temps de l’industrie florissante.
Pique-nique avalé, les marcheurs s’enfoncent dans la cité, où des types réparent une voiture, des jeunes vaquent à leur trafic illégal, des mères de famille font courir leurs marmots et des papas s’affrontent à la pétanque. La vue se dégage sur la mer en fond, le port et ses navires, grues et ponts tournants, puis une enfilade de cités : la Castellane, la Bricarde et le Plan d’Aou. «L’ambition publique est de relier les morceaux entre eux», explique Thierry Durousseau, architecte et urbaniste spécialiste du patrimoine marseillais du XXe siècle. Ici sera construite une route, là un chemin piéton, ces bâtiments seront détruits et ceux-là rénovés.
La batterie de DCA allemande placée sur cette falaise esquintée par les bombardements américains en fit une zone interdite ; le propriétaire vendit à la commune qui y construisit des logements pour la main-d’œuvre des industries du quartier, puis, avec la fin de la guerre d’Algérie, de grands ensembles normalisés de la même époque que la Bricarde et la Castellane, en contrebas.
Centre de vie
«Avec la main-d’œuvre coloniale, commence une intégration. Chaque population est progressivement remplacée par une immigration plus lointaine, avec de la concurrence au travail», raconte la sociologue Samia Chabani. La concurrence se fait désormais sur l’habitat. Ceux qui le peuvent rejoignent les villes nouvelles en périphérie, les autres s’entassent dans ces cités qui se détériorent.
Un centre commercial a néanmoins été posé là, immense. La troupe longe le flanc de colline pour le rejoindre. Grand Littoral a été édifié sur un bidonville, la Parette, le dernier à avoir été résorbé à Marseille, en 1995. De là-haut, la vue embrasse toute la rade nord de la ville dans une belle couleur argentée.
Un jeune homme vient y manger tous les jours, dans sa voiture, sur le parking, face à la vue exceptionnelle sur la mer. Il prend toujours, dans l’hypermarché du centre commercial, une fougasse fromage-lardons, des chips et deux tartes aux fraises au rayon frais. Dans le bidonville, des cabanes de tôles et de planches posées les unes contre les autres, au fur et à mesure que les les familles se sont agrandies. Chacun faisait son petit commerce. Les gens de la Castellane, quand ils vont à Grand Littoral, disent qu’ils descendent «en ville». Quand ils rejoignent avec difficulté l’hypercentre autour du Vieux-Port, ils disent «venir à Marseille». Grand Littoral est leur centre de vie. Sur une pente artificielle de déblais, trois chèvres s’agrippent comme des chamois. Elles appartiennent à des gitans de la résidence de la Nouvelle Laurette, construite pour eux juste en dessous.
On poursuit le chemin entre les ronces, les spigaous (herbes sèches), le long d’un canal désaffecté en surplomb de terrains inconstructibles et de la dernière tuilerie, pour sortir par un petit parc méconnu sur l’avenue de la Viste. Que veulent les gamins ici ? Ceux dont le seul luxe est l’insolence regardent passer les promeneurs d’un air rigolard. Ils mettent tout leur fric dans leurs chaussures. Comme pour fouler des pieds les richesses mises devant leur nez. Sans boulot, le rêve est de «devenir un Frédéric». Un Frédéric ? «Oui, un Français quoi, avec un crédit, une femme, une maison, une bonne bagnole…» Pour aller ensuite traîner à Plan-de-Campagne.
Un récit de Philippe Pujol pour Le Bureau des guides du GR 2013 publié dans Libération
Point 2 – De Barnéoud à la ville franchiséePoint 3 – Lecture de strates
Point 4 – St-Antoine Gare Franche
Interlude – Traversée du Plan d’Aou
Point 5 – Les 4000Point 6 – Bassin de séon
Co-production Euphonia / Bureau des guides du GR2013. Productrice : Julie de Muer – Réalisation : Jean Baptiste Imbert

© Geoffroy Mathieu

© Geoffroy Mathieu
Balade le long de l’ancienne voie ferrée de Valdonne (La Bouilladisse-Roquevaire-Aubagne).
Lundi 1er juin 2015 – LA VOIE DE VALDONNE : De la Bouilladisse à Aubagne
De la Bouilladisse à Aubagne, en piémont du massif de l’Etoile, au fil de la vallée de l’Huveaune, le long de la voie ferrée abandonnée de Valdonne – grand vestige industriel bientôt support d’un nouvel équipement de transport métropolitain.
Nous allons marcher à travers les herbes et les ronces, sur les 14 kilomètres des traverses patinées de l’ancienne voie ferrée de Valdonne, qui relie le village de La Bouilladisse à Aubagne. Les architectes, experts et membres de la mission interministérielle pour le projet métropolitain d’Aix-Marseille-Provence, qui explorent le territoire pour leur troisième randonnée, foulent aujourd’hui le béton craquelé de la gare de La Bouilladisse.
Il leur faut imaginer qu’à partir d’ici, en 2020, devrait circuler un tramway. Il desservira la dizaine de localités jalonnant ses rails en moins de trente minutes, pour soulager les 60 000 riverains et décourager une partie des 110 000 automobilistes coincés quotidiennement dans les bouchons entre Aubagne et Marseille. Né de la volonté des communes, porté par le Pays d’Aubagne et de l’Etoile, le projet prend encore plus de sens dans le contexte de la métropole. Avec 18 millions d’euros d’investissement de l’Etat, le «Valtram» devrait recoudre un territoire morcelé, traversé de montagnes, qui s’étend de l’Est marseillais aux terres argileuses d’Aubagne. Et peut-être, qui sait, raccrocher les wagons entre l’intercommunalité d’Aubagne, opposée de longue date à l’idée d’une métropole, et Marseille, farouchement pour.
On n’en est pas là. Aujourd’hui, pour rallier depuis Marseille le village de La Bouilladisse, il faut d’abord prendre le train jusqu’à Aubagne, puis monter dans un bus jusqu’à l’ancienne gare de La Bouilladisse. A mesure que le TER s’éloigne de Marseille, traverse le bassin industriel de la haute vallée de l’Huveaune, coupée de montagnes lacérées de routes et percées de tunnels pour s’avancer vers les terres plus agricoles, on mesure le problème. Autour des villages, des zones pavillonnaires se sont étalées vers les massifs. Les axes routiers pour gagner Aix ou Marseille déversent un trafic incessant. Dans les véhicules, de nouveaux habitants pourtant venus là pour fuir le vacarme marseillais.
Entre Aubagne et Marseille, plus de 34 000 déplacements s’effectuent chaque jour en voiture. Les bus de l’agglomération sont gratuits depuis 2009 et desservent treize communes jusque dans le Var. Mais ils n’échappent pas aux bouchons. De toute façon, il n’y a actuellement pas assez de voies ferrées pour créer un maillage efficace, c’est-à-dire relié avec les autres transports collectifs.
La réhabilitation de la voie ferrée de Valdonne, en site propre, doit permettre à ce territoire d’être connu autrement que comme un dortoir ou un échangeur autoroutier. Réutiliser la vieille ligne, «c’est prolonger, et prolonger, c’est rentabiliser», résume le préfet Laurent Théry. Il va falloir enlever beaucoup de rouille sur ces rails posés en 1868 entre Aubagne et La Barque par la Compagnie de chemins de fer Paris-Lyon-Méditerranée. «Installée pour acheminer le charbon des mines de Fuveau, Peypin ou Auriol et pour alimenter les usines de savon, de soude, les cimenteries et plâtreries de tout le bassin marseillais par la suite, la ligne a rapidement été utilisée par les ouvriers et les habitants», rappelle Claude Iérace, fils et petit-fils de mineur. La fin des mines a entraîné l’arrêt de la ligne après presque un siècle de service.
A cette évolution de l’économie locale, fatale au rail, se sont ajoutés les affrontements politiques. L’évocation de la métropole réveille la défiance séculaire des communes de la périphérie à l’égard de Marseille. Maire de la cité phocéenne pendant plus de trente ans, Gaston Defferre était engagé dans un bras de fer permanent avec les tenants des bastions communistes qui entouraient sa ville.
Il en reste des traces. En 2010, un référendum sur le Pays d’Aubagne rejetait l’idée d’un Grand Marseille à 93 %. «La métropole risque de revenir sur nos choix de transports alternatifs», justifiait alors le maire communiste d’Aubagne, Daniel Fontaine. Pourtant, le projet du Valtram avait été acté par son prédécesseur. Une élection municipale plus tard, tout était balayé : le projet semblait soudain trop coûteux et la présidente de l’intercommunalité menaçait même de se «coucher sur les rails du tram». Le matériel et les rames avaient été commandés et payés. Ils se sont retrouvés au garage. Devant le quai de la vieille gare de La Bouilladisse, des terrains de tennis ont remplacé les hangars du fret. Le maire, André Jullien, présente ses futurs aménagements – «lycée pour 1 000 élèves, 350 logements dont 30 % sociaux avec un label écoquartier, parking en liaison avec un tram en site propre qui ira un jour jusqu’à Marseille». Mais il avertit d’emblée qu’il arrêtera la marche de l’engin aux limites de sa commune. La présidente de l’agglomération du Pays d’Aubagne et de l’Etoile, Sylvia Barthélémy (UDI), était comme lui sur la même ligne anti-tram. Voilà qu’elle a changé d’avis et nous assure maintenant : «Ce grand projet d’aménagement est attendu depuis longtemps. 60 % de la population habite hors Aubagne et le développement se fait surtout sur le nord.»
Au bord de la voie ferrée, un gros tuyau vert en métal nous accompagne. Destiné l’évacuation des boues rouges de l’usine d’alumine de Gardanne (Alteo), le serpent topaze colle aux rails, et ne nous quittera plus, fil vert de la marche quand disparaîtront rails et traverses. Alteo emploie 500 salariés, et c’est de là que proviennent les composants d’un téléphone portable sur deux dans le monde. Depuis plus d’une décennie, ses boues rouges sont déversées dans une fosse marine au large de Cassis. «On a un milieu naturel remarquable et de belles pépites industrielles. D’ici peu, suite aux décrets pris en préfecture, l’usine ne rejettera plus que des eaux résiduelles dans le parc naturel des Calanques», veut rassurer le député Vert François-Michel Lambert, qui voit dans la métropole «un formidable outil au service des communes». Evoquant les possibilités d’une écologie industrielle, il souligne que «la poussière de l’un doit devenir le ciment de l’autre».
A la lisière de La Destrousse, le rail est interrompu par la RD 45. Un pont-rail, ou l’abaissement de la chaussée, devrait surmonter l’écueil. «Nous mêlons les contraintes autoroutières à celles du charme champêtre», ironise l’urbaniste Christian Devillers en enjambant un ancien aiguillage. Puis, un bruit d’eau vive, une cascade, de la fraîcheur. «Voilà l’Huveaune !»Le groupe dégringole vers les berges pour un providentiel pique-nique. Un béal (petit canal d’irrigation) rappelle la présence d’un des nombreux moulins qui ont jalonné les rives de l’Huveaune. «Il y en a eu jusqu’à 65, rappelleClaude Carbonnel, du collectif Associations Huveaune.Mais la rivière a perdu de son importance en 1848, car l’eau de la Durance est arrivée à Marseille. La vapeur et l’électricité en ont fini avec ces moulins qui tenaient depuis le Moyen Age et ont alimenté les sociétés Rivoire et Carret ou Atochem».
Depuis quelques années, associations et élus se mobilisent pour le fleuve. Un système intercommunal a été mis en place pour gérer les inondations et l’entretien des berges. A Roquevaire, on boit l’eau de l’Huveaune en régie municipale, «autonomie qu’on ne veut pas dissoudre dans la métropole», insiste le maire, «car on pompe à un tarif très avantageux».
A l’ombre des platanes, les urbanistes se prennent à rêver les aménagements autour du futur tram. Faire de la ville autour des stations, avec des aménagements piétons, cyclables ou léger intégrés au cœur des villages.
Après Roquevaire, la voie ferrée descend vers la plaine agricole d’Aubagne. La haute façade de l’exploitation de Jérôme Laplane borde la route. Installé en 1991 sur une partie des terres familiales, l’agriculteur bio vend au détail sur place et approvisionne les marchés marseillais. «J’ai un petit chiffre d’affaire, je fonctionne avec 120 familles clientes»,explique le maraîcher, qui s’étend, en Amap (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne), sur cinq hectares. «Il existe une demande sur ce bassin où vivent un million de personnes», mais une partie du zonage agricole «n’est pas remise à disposition car les propriétaires qui n’exploitent plus ne veulent ni vendre ni louer»,déplore-t-il. Laplane lui-même cultive trois hectares avec un bail précaire. «Un quart des terres fertiles a été urbanisé et on se retrouve avec le foncier maraîcher le plus cher du département…»
Le groupe se remet en route vers Aubagne. Dernier stop à l’ancienne gare de Pont-de-l’Etoile. Entre élus et membres du conseil de développement, on fait le point sur l’avenir possible de la voie de Valdonne. Le débat porte sur une question technique : les voyageurs accepteront-ils d’aller en tramway de Marseille à Aubagne pour changer et prendre ensuite un train ? Une étude a montré qu’une correspondance est toujours dissuasive. Pour relier l’Huveaune à Marseille, seul un tram-train ferait l’affaire. Arriver à marier les techniques ferroviaires et les convictions politiques dans un même projet : la naissance de la métropole passera aussi par là.
Un récit de Myriam Guillaume pour Le Bureau des guides du GR 2013 publié dans Libération
Point 8 – Gare de Pont de l’étoile
Co-production Euphonia / Bureau des guides du GR2013. Productrice : Julie de Muer – Réalisation : Jean Baptiste Imbert

© Camille Fallet

© Camille Fallet
Balade de Martigues à Port-de-Bouc, en surplomb du chenal de Caronte, dans une zone aux paysages marqués par les vestiges de la pétrochimie.
Mardi 2 juin 2015 – LE CHENAL DE CARONTE : De Martigues à Port-de-Bouc
De la noble Martigues à Port-de-bouc la populaire, le long du chenal de Caronte, un espace urbain et industriel aménagé depuis l’époque romaine – un territoire stratégique entre Marseille et le Rhône.
Le soleil tombe à la verticale sur nos crânes. Vus du ciel, nous sommes une trentaine de bipèdes immobiles, tous tournés dans la même direction. Après avoir gravi la draille qui serpente dans la pinède, nous voici, randonneurs de la mission interministérielle pour le projet métropolitain Aix-Marseille-Provence, arrivés au point culminant de notre marche, sur les hauteurs de la ville de Martigues. Dans notre dos se dresse la chapelle Notre-Dame-des-Marins, qu’une main semble avoir posée au sommet de la colline. Mais ce n’est pas elle qui nous intéresse.
Nos yeux glissent vers un spectacle plus grandiose. Depuis les rives de l’étang de Berre, d’où nous sommes partis ce matin, Martigues s’étale le long d’un canal qui court sous de vastes zones industrielles pour se jeter dans la Méditerranée. «Vous voyez, là-bas, à droite, Stalingrad sur la mer ? C’est Port-de-Bouc !» lâche Nicolas Mémain, artiste marcheur, l’un des guides de notre exploration.
Pour le moment, comme en lévitation au-dessus de l’immense mer intérieure que forme l’étang de Berre, se dessine à l’horizon le fantôme de la Sainte-Victoire. A droite de la montagne, le regard est saisi par le contraste que provoque, dans ce panorama, la forêt de cheminées et de torchères des usines pétrochimiques. Certaines, à larges bandes rouges et blanches «ressemblent à la fusée de Tintin sur la Lune», remarque encore Nicolas Mémain qui, avec son bout de tissu blanc sur la tête, a des airs de capitaine Haddock au Pays de l’or noir. Sur le dessin de la table d’orientation, aucune mention des usines de Croix-Sainte et des raffineries de Lavéra qui se dressent pourtant devant nous. Un mirage ? Non, c’est bien un paysage façonné par l’industrie qui se déploie sous nos yeux – une industrie en plein déclin.
Utopies métropolitaines
Chapeau mou vissé sur la tête, David Mangin a rangé son carnet de croquis dans son sac et fait comme le reste de la troupe : il se laisse absorber par la vue. Associé de l’agence Seura, il pilote l’une des trois équipes d’urbanistes sélectionnées pour la consultation urbaine Aix-Marseille-Provence. Bien qu’avouant détester la randonnée, il n’est pas mécontent de cette réunion champêtre itinérante qu’il juge «plus stimulante que les restitutions académiques en Power Point du Grand Paris».
Nous sommes ici au cœur du «Far West» de Marseille. A une quarantaine de kilomètres, au nord-ouest de la ville, l’étang de Berre et ses environs furent convoités dès le début du XXe siècle. A l’époque, les élites marseillaises étaient persuadées que la «conquête de l’Ouest»serait le ticket gagnant pour connecter Marseille à la France et à l’Europe. On rêvait alors d’une ouverture vers le Rhône, et du Rhône vers le Rhin. «C’est avec cette idée d’un « Grand Marseille » ouvert sur l’étang de Berre qu’est née au début du siècle dernier la première utopie métropolitaine», explique René Borruey, historien et architecte.
Mais si l’idée d’un développement vers l’Ouest est venue de Marseille, sa réalisation s’est faite sans elle. A la fin des années 60, une seconde utopie métropolitaine a vu le jour, fondée sur une autre illusion : celle d’une expansion de la ville mère sur «sa» région. Un échec, là encore. «Marseille est la seule grande ville de France à ne pas être reconnue comme un centre par sa périphérie», résume René Borruey. Si on fait le compte, avec la métropole, Marseille en est donc à sa troisième utopie métropolitaine… qui peine toujours à se réaliser. Et dans l’opposition historique des communes au projet métropolitain, les deux villes communistes que sont Martigues et Port-de-Bouc figurent en bonne place. Deux villes rouges, mais que tout oppose.
D’un côté Martigues, ancienne cité gallo-romaine, riche et orgueilleuse, surnommée la «Venise provençale». De l’autre, Port-de-Bouc, construite au XIXe siècle, industrielle et dont les chantiers navals ont attiré des ouvriers de toute la Méditerranée. Les joignant comme un trait d’union : le chenal de Caronte, passage naturel entre la mer de Berre et la Méditerranée, a été creusé davantage dans l’entre-deux-guerres pour laisser passer les pétroliers. Depuis 2011, les deux villes cohabitent dans une communauté d’agglomérations de façade. Assises au bord d’un même canal, elles se regardent en fait en chiens de faïence.
Balcon sur la chimie
L’assemblée se disperse, chacun reprend sa marche. Après plusieurs lotissements, nos pieds passent en quelques mètres du bitume à une terre rocailleuse. Nous arrivons au plateau du Campeou, sorte de colline recouverte de garrigue et de buissons de genêts, traversée par une étroite voie de chemin de fer. C’est là, à quelques enjambées de la petite gare abandonnée de Croix-Sainte, en surplomb du chenal de Caronte, que nous nous installons pour le pique-nique.
«Pendant la Première Guerre mondiale, les usines chimiques ont poussé comme des champignons ici», raconte Philippe Mioche, historien de l’industrie, pendant que circulent poulpes, pois chiches, poutargues. Parallèlement, le chenal est devenu un port pétrolier autour duquel s’installeront plusieurs raffineries. Encore visibles aujourd’hui, elles ne seront bientôt que des vestiges. Entamée dans les années 70, la désindustrialisation s’est accentuée ces dernières années au gré des fermetures de raffineries et des plans sociaux. Entre-temps, le territoire aura bien trinqué. «Nous nous trouvons ici dans un des lieux les plus pollués d’Europe du Sud», assure Philippe Mioche. En haut du podium : Azur Chimie, à l’entrée de Port-de-Bouc, une de nos prochaines étapes.
Industrie du cinéma
Le vacarme d’un train de marchandises à wagons-citernes nous tire de notre torpeur digestive. Nous nous remettons en marche. La vue qui s’offre à nous désormais est une superposition de rectangles monochromes, à la Nicolas de Staël : l’azur du ciel, le vert de la végétation, le brun des entrepôts, la ligne grise d’un pipeline et l’émeraude du chenal.
L’aménagement des berges est un dossier épineux pour la ville de Martigues : le site de Lavéra, côté sud, compte à lui seul onze usines classées Seveso. Côté nord, où nous nous trouvons, une grande friche de 22 hectares est en cours de réhabilitation. «Martigues accompagne un ambitieux projet autour de l’industrie du cinéma», explique Sophie Bertran de Balanda, architecte de la ville. «Des studios de cinéma sont en construction dans les anciennes usines Eternit qui longent le canal […]. Nous recevons beaucoup de propositions d’investisseurs privés… Un cinéma d’art et essai pourrait aussi s’implanter ici», poursuit-elle, provoquant chez David Mangin quelques murmures glissés à l’oreille de son voisin.
«Cette longue bande au bord de l’eau est assez convoitée par des promoteurs immobiliers qui rêveraient d’en faire une marina, explique-t-il. L’aménagement des rives de ce canal est un cas typique d’enjeu métropolitain car c’est le port autonome de Marseille qui est propriétaire du foncier. Si une offre culturelle se développe, il faudra songer au transport. Pourquoi pas une vedette sur le canal, de Marignane à Port-de-Bouc ? Ce qui est certain, c’est que Martigues ne pourra pas faire son projet toute seule dans son coin, elle aura forcément besoin de la métropole.»
Périple postapocalypse
Un avion déchire le ciel. Bientôt le Campeou va disparaître derrière nous. Une route, un palmier, nous voici à l’entrée du chantier de démolition du site d’Azur Chimie, ancienne usine spécialisée dans le traitement du brome. Ses portes ont fermé en 2010. Séverine Mignot, architecte de la ville de Port-de-Bouc, nous ouvre l’accès à cet immense no man’s land. Bitume balafré, mélanges informes de terre et de cailloux, deux gros talus de pierre grise, des bouts de ferrailles dans des bouquets d’herbes sauvages et un pan de mur recouvert de graffitis qui manque de s’écrouler : un périple post-apocalypse. Avant d’être démoli, le site a été entièrement dépollué – pour 2,5 millions d’euros. La ville de Port-de-Bouc envisage d’y installer des entreprises, probablement dans le secteur de la réparation de bateaux. «Peu importe, du moment que ça apporte du travail et que ça ne pollue pas», affirme Séverine Mignot.
En tout, ce sont neuf kilomètres de littoral que la ville de Port-de-Bouc souhaite aménager et développer. Dans les négociations, que ce soit pour l’achat des terrains ou pour leur aménagement, la municipalité doit faire avec l’établissement public du port de Marseille, le GPMM (Grand Port maritime de Marseille) qui, comme à Martigues, occupe une partie du littoral.
Nous continuons à longer le canal. Des rouleaux de filets de pêche traînent entre deux conteneurs. De grandes cuves à pétrole occupent tout l’espace de la rive opposée. Objet métropolitain par excellence, grand comme Paris intra-muros, le port de Marseille représente 43 000 emplois indirects. Et le foncier constitue un enjeu de plus en plus important pour le premier port de France. Encore faut-il savoir qu’en faire. Et qui s’en occupera.
Un récit de Lucie Geffroy pour Le Bureau des guides du GR 2013 publié dans Libération
Point 4 – Notre-Dame des marins
Point 5 – Martigues – Port-de-bouc
Point 8 – Azur Chimie – Port-de-bouc
Co-production Euphonia / Bureau des guides du GR2013. Productrice : Julie de Muer – Réalisation : Jean Baptiste Imbert

© Giacomo Furlanetto

© Giacomo Furlanetto
Samedi 25 mai 2019 – De Septèmes-les-Vallons aux Aygalades on prend soin du Ruisseau Caravelle/des Aygalades…
〓 De Septèmes-les-Vallons aux Aygalades, on prend soin du Ruisseau Caravelle/des Aygalades…
►On ramasse les déchets –> pour agir
►On les inventorie –> pour connaitre
►On les raconte –> pour comprendre et apprendre
►On se rencontre –> pour se motiver, se relier et s’amuser
Nous habitons dans une vallée où coule un fleuve. Il est un peu malicieux, il change de nom parfois, disparait souvent… Dans cette vallée s’écoulent aussi beaucoup de déchets, parfois grands comme un frigo, industriels comme un terril d’alumine, liquides comme une huile de vidange, jeune comme un Capri Sun, emblématiques comme le plastique. Par modestie, affection, oubli, on appelle ce fleuve : le ruisseau. Un jour, après beaucoup d’autres jours où les uns ou les autres avaient observé, raconté, débroussaillé le ruisseau, on s’est dit qu’on pouvait faire quelque chose tous ensemble…
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◢ UNE COLLECTE SUR 3 POINTS ◣
❉ Septèmes-les-Vallons de 9h30 à 12h ❉
RDV Vallon du maire et 143 Av. du 8 mai 1945 avec l’EJS et le Centre social de la Gavotte Peyret – Sans inscription
❉ Notre Dame Limite de 9h30 à 12h ❉ RDV parking Piacenza avec l’AESE – Collation offerte par les commerçants du quartier – Sans inscription
❉ Cascade des Aygalades de 14h à 17h
❉ RDV à La Cité des arts de la rue à Marseille – Avec la complicité des artistes-voisins. ( Accueil à partir de 13h30 )
◢ UNE GRANDE BALADE ◣
Capri Sun avec le Collectif SAFI et Raphaël Joffrin de 9h à 17h Une marche le long du ruisseau de Septèmes aux Aygalades pour relier, documenter et raconter l’opération.
———– Cette promenade s’inscrit dans un programme de 5 ans du projet Nature 4 City Life (2017-2022) favorisant une meilleure intégration de la nature au projet urbain dans un contexte de changement climatique.
◢ UN TEMPS D’ÉCHANGES FESTIFS ◣ à la La Cité des arts de la rue • A 17h, conférence dessinée : les artistes du collectif SAFI et les marcheurs de la grande balade nous racontent… • Et jusqu’à la tombée du jour, on fête en musique le ruisseau ! Collation offerte par la Cité des arts de la rue et les commerçants voisins.
Le Ruisseau des Aygalades ou Caravelle (en fonction de là où l’on habite) est un fleuve côtier de 17 km de long. Il prend sa source dans le massif de l’Étoile et se compose d’un ensemble de résurgences canalisées dans la carrière de la Malle (entre Septèmes-les-Vallons et Bouc Bel Air). Dessinant une vallée, son bassin versant comprend de multiples affluents, notamment de petits cours d’eau devenus parfois presque invisibles mais qui participent à son existence et au réseau d’eau dont dépend l’environnement de nos quartiers. Le Ruisseau s’écoule ensuite dans Marseille et se jette dans le bassin d’Arenc au sein du Grand port maritime. Peu à peu, grâce à de nombreuses initiatives d’habitants et d’acteurs locaux, la mémoire du Ruisseau est réapparue après des années de dégradation et d’oubli collectif. Aujourd’hui nous sommes nombreux à vouloir mieux le connaître, le comprendre et en prendre soin. Car un cours d’eau, au-delà du souvenir, est un enjeu important pour la biodiversité, la circulation des espèces et plus généralement notre rapport à la nature, même en ville ! Nous avons tous, voisins de tout près ou d’un peu plus loin, associations, artistes, habitants ou entreprises riveraines, maintenant un rôle à jouer pour son devenir…
Opération Plastic Valley est une étape de la mobilisation autour du devenir du Ruisseau des Aygalades/Caravelle animée par le Collectif des Gammares.Réunissant des associations et acteurs actifs le long du ruisseau, le collectif souhaite favoriser un meilleur partage des connaissances, relier les initiatives et les territoires du bassin versant, proposer des actions communes.
Il réunit à ce jour le Bureau des guides du GR2013, Hôtel du Nord, L’ APCAR (Association Pour la Cité des Arts de la Rue), les CIQ riverains, l’association AESE (Action Environnement Septèmes et Environs), les artistes-voisins, Sud Side, le Collectif SAFI et bien d’autres à venir…
Cette journée de ramassage s’inscrit dans la journée Calanques propres organisé par l’Association MerTerre pour préserver le Parc national des Calanques.











de l’Obélisque à Louis Loucheur avec Nicolas Memain le 8 mai 2019 – Marseille
Une histoire des formes urbaines, du logement, du logement social, du rôle de la nature en ville…
Nous irons de l’Obélisque à Louis Loucheur en passant par le Corbusier et Maison Blanche –> 12 km
Départ à 10h de l’Obélisque, arrêt Obélisque ligne 21
quartiers Mazargues, Sainte-Anne, traversée du site le Corbusier, quartier Sainte-Marguerite.
Arrivée vers 16h groupe Louis Loucheur
arrêt Sainte-Thérèse du tramway T1
Une marche proposée par le Bureau des guides du GR2013 dans le cadre d’un partenariat avec le bailleur social 13 Habitat.





